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03/03/2007

Histoire d'un poste sur un piton. (Jean-Yves JAFFRES)

La création de ce poste.

De nombreuses compagnies ou sections étaient disséminées à travers le pays dont certaines se situaient dans le djebel en des endroits plus ou moins isolés et plus ou moins élevés. Chacun de ces pitons a son histoire. Nous allons prendre l'évolution d'un poste et les débuts de la vie sur un piton kabyle, bien simplement en guise d'exemple bien qu'il n'y ait rien d'exemplaire. Il y a certainement d'autres postes qui auraient beaucoup plus d'histoires et d'événements à raconter.

En 1955, la rébellion s'était rapidement étendue en Kabylie et le FLN menaçait la route nationale 12, reliant Alger à Bougie par Tizi-Ouzou. Cette année-là, le général Beauffre installa son PC à Tizi-Ouzou, au cœur de la Kabylie, pour prendre la région en charge. Il avait pour cible les unités constituées par Krim Belkacem, mais il avait aussi la chaine des Bibans et la vallée de la Soummam.

Un mois avant le drame de Palestro, le 21 avril 1956, (voir le chap.6) le général Olié, commandant civil et militaire de la Kabylie, attirait déjà l'attention: "Jai pu m'en rendre compte que les deniers attentats provoquaient dans la population européenne des réactions très caractéristiques. À Abbo, Roberval, Boghni, Mekla, Tizi­-Rénift, Haussonvillers, unanime la crise de confiance, le désespoir devenait quasi-général. La hantise de l'abandon minait les énergies les mieux trempées. À Camp du Maréchal, où un jeune colon de 22 ans fut récemment tué c’était une atmosphère de colère et de révolte qui régnait, semblable à celle que nous avions mesurée à Haussonvillers et à Palestro.

Dans ces secteurs, l'exode se dessinait. Des départs de colons eurent lieu. D'autres, face aux derniers événements, se décidèrent et se préparèrent à liquider leurs biens et à acheter en France, ou encore prospectèrent à l'étranger. Tizi-Ouzou connut les premiers drames d'abandons sans retour. "

Dans cette atmosphère, en ce milieu, fut créé le poste de Béni-Ouarzeddine, en 1956. Le lieutenant colonel Jacques Sautreau me relata cette histoire par écrit et de mémoire, puis le soldat Pedehum Jean Marie, là-bas à cette époque compléta l'information.

Le 15 mai, une vaste opération de nettoyage, dite « basque », fut entreprise. La 5ème compagnie du RIC partie de Mirabeau surprenait les guetteurs, neutralisa un groupe de fellaghas et au prix d'un soldat blessé et du chien éclaireur tué, parvenait à proximité du village de Karboucha. Elle fut alors très sérieusement accrochée par un fort élément rebelle équipé d'armes de guerre qui nous surplombait depuis le piton de Béni-Ouarzeddine. La position devenait intenable. Le caporal-chef radio fut tué et il fallut se replier sous la protection d'un tir d'artillerie. Le commandement décida alors d'implanter la 5' compagnie au cœur même du dispositif FLN, à l'observatoire de Béni-Ouarzeddine d'où les rebelles surveillaient tous les mouvements de troupe sur les routes d'Alger et de Dra-el-­Mizan.

Ainsi, au début du mois de juin 1956, le 2ème bataillon du 2ème Régiment d'infanterie coloniale (à recrutement essentiellement breton et vendéen), venant de Nantes, s'implanta à Camp du Maréchal, Haussonvillers, Mirabeau et El-Tléta, enveloppant les massifs du Sidi Ali-Bou-Nab, position clef du célèbre Krim Belkacem qui était là chez lui, d'où il dirigeait toutes les exactions, embuscades, attentats, sabotages, enlèvements, assassinats.

Le 13juin 1956, profitant de la diversion d'un ratissage général de l'Ali-Bou-Nab, la 5ème compagnie amenée rapidement en camions près de ce piton, investit le village et s'y installa défensivement. D'importants stocks de nourriture et de médicaments furent découverts dans le village. En un mois, il s'y construisit un poste fortifié. Le moitié de l'effectif assurait la sécurité rapprochée face au djebel qui nous dominait, l'autre moitié éleva d'abord un mur crénelé de protection, puis les plates-formes de soubassement des futurs baraquements et, se reposèrent... en montant la garde!

En juillet 1956 le poste était assez équipé et fortifié pour être défendu par une seule section et le reste de la compagnie put reprendre les opérations offensives avec le bataillon, opérations qui, hélas, au prix encore de plusieurs morts et d'un avion d'observation abattu (pilote grièvement blessé) extirpa enfin le gros du FLN de l'Ali­ Bou-Nab. Les incessantes opérations du II / 2 R.I.C ramena progressivement la sécurité. Mais les pentes Est et Sud de l'Ali-Bou-Nab (Tizi-Renift, Beauprêtre...) restèrent infestées de rebelles, protégés par la végétation très dense. Le II / 2 RIC a été relevé de Grande Kabylie à la mi-octobre 1956 et envoyé dans la région d'Orléanville­-Ouarsenis pour y rétablir l'ordre. Je(Le Lt colonel Sautreau.) commandais à l'époque, la 5' compagnie. Le 9' RIC prit la relève.

 

Les premières semaines de l'espoir. (Un reportage de Jean Paillardin, du journal d'Alger en 1956, présenté par R Henricolas.)

 « Il y avait autour de nous tous les notables du village, avec le chef de cette fraction, Kébir, un grand vieillard sec, impression que renforçaient encore, l'ombre d'un immense chapeau et d'épaisses lunettes noires, son air énigmatique. Il y avait une nuée d'enfants. Un surtout, tout petit sous son béret, que nous appelions « moustique » était toujours dans nos jambes, mais son grand copain paraissait être un soldat qui montait la garde au poste. Il y gagna en caramel.

Lorsque nous regardions une carte, du pays, nous voyions d'abord, presque parallèle au littoral, entre le cap Djinet et le cap Tédelès, la route d'Alger à Tizi-Ouzou. Au sud de cette route, prise entre les Issers et Mirabeau, l'arête rocheuse aiguë, orientée sensiblement du sud-ouest au nord-est, que nos Jeeps venaient d'escalader. Nous étions maintenant très exactement au sud-ouest de Camp-du-Maréchal, à 800 mètres d'altitude.

Le lieutenant Dumoutier, qui commandait ce poste, nous montra son chantier. Il s'agit bien d'un chantier de construction. Ici un mur s'élevait, là une nouvelle piste se creusait, là encore, un officier étudiait les moyens de captage d'une source... Je demandai naïvement si une entreprise de travaux publics participait à ces travaux, ou tout au moins une formation du Génie... «Les Marsouins font tout par eux-mêmes», me répondit courtoisement le colonel Viguié. Ils avaient quand même des ouvriers, et c'était déjà surprenant, ces ouvriers kabyles en grand chapeau de paille. Comprenez bien, ici dans les Ali-Bou-Nab, il y avait encore quinze jours, les troupes arrivaient et trouvaient les villages vides seuls des femmes et des enfants qui s'enfermaient dans les maisons. Les hommes avaient suivi les hors la loi dans la montagne pour des raisons complexes mais surtout parce qu'ils avaient peur de tout le monde Mais peu à peu, ils revinrent. Maintenant le chef du poste refusait de l'embauche.

Nous nous arrêtions devant un robinet. Les plus petites choses prenaient ici leur importance réelle. Parfois les indigènes demandaient comme faveur suprême de leur offrir en gage d'amitié, un de ces petits bouts de métal qui donnaient de l'eau. Les villages kabyles étaient construits sur des hauteurs parfois difficiles d'accès, et le problème de l'eau restait toujours posé avec acuité, surtout pour les femmes. Le capitaine Fernando et les gens du 9' RIC captèrent une source très loin, et ils amenèrent jusqu'au centre du village un débit de 5 à 6 litres-minute.

Il serait cependant naïf de s'imaginer que les Kabyles nous étaient éperdument reconnaissants, d'abord parce qu'ils avaient une tendance à croire que tout leur était dû par la France, et qu'il valait mieux récriminer toujours plus pour tâcher d'obtenir davantage. Ensuite, parce que la corvée d'eau, c'était surtout dévolu aux femmes qu'on voyait grimper les pentes depuis le cours d'eau jusqu'au village, leurs préhistoriques amphores sur la tête. Le mari allait surtout au marché hebdomadaire dans la vallée. Il s'occupait de ventes, d'achats et de politique, c'est-à-dire des affaires sérieuses.

Un jour nous eûmes une surprise au cantonnement, une femme toute ridée amenait son petit fils au médecin-capitaine Ricossé. Le garçon toussait depuis longtemps, mais elle ne pouvait pas le conduire plus tôt au «toubib»... Elle remercia aussi le docteur pour sa fille qui était maintenant guérie. La confiance s'établit ainsi progressivement, le «toubib» fut même autorisé par les Kabyles à soigner leurs femmes! C'était une marque de confiance extrêmement rare. Aussi rare que de voir des semailles sur un sol rocheux,»

Ret e oa deomp da vibanan o degemer er gêriadeun, eno, war or n'enez. Gwelet a raemp stadpaour ha reuzeudik kaîz anezho. Evel-se, hor boa ofizians hag e c 'bellemp o sikour: shaliata ar 'vugale, or n~edisin a selle ou~h Oc 'hlenvedoù hag a me louzeler. » C’est du Breton; voici la traduction : « Il nous fallait au moins les recevoir là au village, dans la montagne. Nous voyions leur état pauvre et malheureux de beaucoup d'entre eux. Ainsi, nous avions leur confiance et nous pouvions les aider scolariser les enfants ; le médecin observait leur ennuis de santé et donnait des médicaments...»

 

Puis vint le tour de la classe 57-2 /C de prendre le relais.

Nous attendîmes une dizaine de jours à Camp du Maréchal, c'est-à-dire jusqu'au prochain convoi de ravitaillement qui nous mènera au piton de Béni­-Ouarzeddine. Ce village avait la même origine alsacienne que Haussonvillers et son nom rappelait l'installation sur ce point du maréchal Bugeaud lors de l'expédition de 1844, sur la rive gauche de l'oued Sébaou. Ce lieu aussi, dans une période plus ancienne, fit un poste de garde turc qui joua un grand rôle dans les guerres entre Algériens et Kabyles. Ainsi, avant hier, hier et aujourd'hui se retrouvaient sur ce terrain.

Ce convoi pour nous diriger sur le piton nous surprit à plus d'un titre. D'abord, l'artillerie «canardait» les points stratégiques de notre parcours, elle préparait notre passage. Un piper dans les airs, tel un faucon à l'œil perçant, surveillait les alentours et préviendrait de toute anomalie perceptible. Des half-tracks ou automitrailleuses protégeaient l'avant et l'arrière du convoi. Les anciens ne parlaient pas beaucoup, sinon pour nous raconter les pépins qu'il y eut dans les parages dans un passé récent, tout en scrutant les flancs du djebel où nous passions, toujours prêts à intervenir. Nous étions tous en casque lourd. C'est ainsi que nous sommes montés la première fois à la treizième compagnie du 3/9ème R.I.Ma. Un piton bordé de barbelés nous attendait Ce sommet était tout en dénivelé, le village berbère d'une extrémité et nous de l'autre. Nous nous situions face aux monts du Djurdjura sous un soleil brûlant, loin des nôtres, dans la solitude et pour un certain temps.

Le camp était en fait au sommet d’un piton. Il y avait d’autres sommets environnants au sud , à l’ouest et au nord qui dominaient notre village ; c’est souvent le cas dans les postes du djebel ? Ces collines périphériques limitaient notre horizon. Le cantonnement militaire, siège de la compagnie, prit position côté ouest du village, la partie kabyle se situait à l'est du piton. Notre site était entouré de barbelés. Il y avait deux postes de garde de jour et quatre la nuit. Nous avions un four à pain où le boulanger faisait parfois de la pâtisserie et il servait aux cuisiniers pour diverses cuissons. Des soldats résidaient en des baraquements du bas et dans des mechtas du haut.

 

Évolution de ce piton

Nous pouvons constater une nette évolution des bâtiments au P C de la compagnie de 1956 à 1958. Ces constructions resteront ainsi en place de 1958 a 1960 (voir photo p 111) Ensuite ils furent démontés comme nous pourrons le constater. La suite de cette histoire nous est narrée par un instituteur civil qui y est resté en Algérie après son temps de service militaire

Ces élèves étaient volontaires, joueurs, espiègles, comme beaucoup d'enfants de cet âge en France. Nous avions leur confiance. Tout en étant réservés, ils parlaient de choses et d'autres facilement. Ils se faisaient un plaisir de nous vendre quelques œufs, un poulet... Nous allions parfois faire un tour en leur village (cependant nous allions toujours à plusieurs et gardions l'œil attentif On ne sait jamais !)

Nous(Information donnée par E. ALIX) sommes sur l'aire bétonnée où se situaient les baraquements des années passées. D'une compagnie de plus de cent soldats 1956 à début 1960, l'effectif s'était considérablement réduit. En effet, il fit créé une S.A.S à proximité, dans le village de Sidi Ah Bou Nab et un groupe d'autodéfense fut instauré à Béni­-Ouarzeddine courant 1960. Il ne restait plus qu'une dizaine de militaires sur place et l'instituteur. Lorsque ces militaires rejoignaient la compagnie pour une opération, je restais seul avec mes élèves. Les murs de protection étaient défaits, les baraques n'existaient plus et il n'y avait plus de barbelés autour du cantonnement.

À « Béni » nous n'avions essuyé, qu'une seule fois, un coup de fusil du village en ruine de la crête d'en face. Mais, une nuit, nous eûmes droit à des jets de pierres venant du village. Cela commençait à sentir l'indépendance lorsque je quittai les lieux en juin 1961 pour la SAS. Là, je me sentais plus en sécurité et j'avais l’électricité. Cependant le danger était toujours présent.

medium_JAFFRES-Jean-Yves.jpgJean-Yves JAFFRÈS

La vie des soldats bretons

dans la guerre d'Algérie

2000

Pages 110 à 120

Texte numérisé par GeLamBre

 

 

Commentaires

Votre témoignage m'a fortement intéressé car je n'ai connu la Kabylie qu'en 1961, lorsque la politique était plutôt orientée vers la fermeture et l'abandon des postes...
Je vous invite à découvrir sur le sitelimafox ce que j'ai fait de mes vingt ans. J'ai nommé cette séquence de vie "La Baraka de Limafox".
http://sitelimafox.free.fr/AFN/PageWeb.htm

Écrit par : François LAMOUR | 03/04/2007

Bonjour
Par le journal O-F de ce jour, je viens de découvrir le site qui m'a intéressé. Je suis de la classe 57/2C et j'ai été deux ans au 2/9 ème rima. Je suis arrivé par l'Athos 2 aussitôt les évènements de mai 58. Affecté à la 6 ème Cie à Ouled -Ali (la Cie du lt Artur) puis à la 7 ème et à la 8 ème à Timezerit dans les Ali bou Nab, j'ai bien connu les lieux du récit. Bravo pour le travail de mémoire et bien cordialement. Paul Calandreau

Écrit par : CALANDREAU | 31/12/2007

je suis de la region ou se sont passe ces fait .merci pour votre temoignage.je veux aussi avoir des documents(photos si possible.

Écrit par : mohand seddiki | 10/01/2008

message a sitelimafox
monsieur François LAMOUR


merci de me contacter par email ou mobile 00213771264337
pour echange d'informations sur la guerre d'algerie-en kabylie iferhounene michelet entre 1956 et 1962
abdenour
sihadj.abdenour@hotmail.com

Écrit par : si hadj mohand | 27/03/2008

Guerre d’Algérie 1954-1962
Accrochage à Iril El Arvi
Iferhounéne

Eté 1961, toute la région d’iferhounéne était plongée dans le noir d’une nuit fraîche sans étoile, ni clair obscur. À 150 mètres seulement du village est posté depuis 1956 le camp des chasseurs alpins entouré de fils barbelés et quadrillé aux quatre coins cardinaux par des blockhaus.

Régulièrement les soldats roumi, accompagnés de supplétifs autochtones, venaient visiter le village non pas pour un Salem alikoum (1) plein de courtoisie pour ces kabyles à l’hospitalité légendaire, mais bien pour s'adonner aux fouilles et aux interrogatoires d’une population déjà fortement ébranlée par les premières exécutions sommaires et les fréquentes attaques nocturnes des éléments solidement armés du redoutable colonel Amirouche.

(1) Salem alikoum : que le salut soit sur vous

Cette horde de fse et fsna, vient souvent la nuit arracher brutalement à leur sommeil profond, ces montagnards innocents, primitifs j’allais dire sans aucune connotation péjorative. La trouille, la faim, le froid règnent déjà en maîtres absolus dans cette atmosphère de guerre, de mort.

Cette nuit, ils étaient nombreux, ces fsna envoyés en renfort à partir de Palestro (2).Ces soldats français d’origine algérienne, on les appelait ici chez nous, les Imnouchens (2).

(2) imnouchens : c’est le nom en kabyle donné aux supplétifs de la région de Palestro ( Lakhdaria) qui sont dispatchés sur d’autres régions de Kabylie

Ces imnouchenes, vont se fondre dans cette compagnie composée de plusieurs sections de FSE, FSNA, et de harkis originaires des villages avoisinant. Il y en aurait même de nos voisins, sans doute un peu trop jeunes pour se manifester de façon agressive.
Cette nuit qui restera gravée dans la mémoire de tous ces indigènes kabyles
Sera témoin pour l’histoire de la Kabylie d’un violent accrochage entre fellaghas et les éléments supplétifs fsna, ces imnouchens, encadrés par les chasseurs du lieutenant HEIM.

A contrebas du village iril El Arbi (Ath ARVI en kabyle) à 1 km à peine à vol d'oiseau et à moins de 3, en empruntant la piste carrossable et sinueuse, un dur accrochage venait de se produire, opposant un groupe de maquisards retranchés dans une grotte au lieu dit thilmanthine (3), aux militaires français qui les avaient encerclés.

(3) thilmathine : champ situé à contrebas du village ATH ARVI, et surplombant le village TIKILSA, sur le trajet de l’oued Tirourda.Ce nom de camp, comme, il est courant chez les kabyles, est donné pour signifier les prairies.

Cet accrochage va mobiliser des renforts militaires mais aussi des hommes kabyles puisés dans la population civile. Le repère des fellagas cerné, mis dans un état de siége, attendait des renforts et des munitions du camp d’iferhounene. Il était à peine 6 heures ou 7 heures du soir.

Une section complète des chasseurs alpins, dans laquelle figurait le redoutable harki du nom de Mohand T s’est déplacée au village vers 8 heures du soir pour réquisitionner, hommes et bêtes de somme, et mon frère abdallâh, Houche Tahar, Si Hadj Mohand s, Belkadi A, Samer M feront partie du lot. Ils seront sans doute utilisés comme instruments, moyens ou
Simplement comme chair à canon dans cette sale besogne : assurer l’acheminement des caisses de munitions, et des rations alimentaires pour ces embusqués dans la forêt au pied du piton sur lequel de loin, nous apparaissait, perché au sommet, le village Iril El Arbi. (4)

(4) Iril El Arbi : nom donné par la France coloniale au village kabyle ATH Arvi , situé entre les villages de Soumer et Iferhounéne.

Le chemin emprunté, accidenté, s’étirant sur un relief escarpé, avait été bifurqué sciemment pour éviter tout accrochage ou embuscade qui seraient provoqués par la présence d’éventuels groupes de fellaghas qui font légion dans cette partie du territoire.
Le convoi doté de bêtes de sommes devait emprunter un itinéraire des plus irréguliers, pour tromper sans aucun doute la vigilance des guetteurs kabyles qui se sont montrés très efficaces dans leurs missions courageuses et dangereuses.
Au départ du village, le harki notoirement connu en l’occurrence Mohand T. commençait à proférer des menaces en direction de mon frère Abdallâh qui devait avoir à cette époque à peine 17 ans.
Il avertit d’emblée les autres supplétifs et harkis en le désignant tout de go, qu’il ne fallait , en aucun cas faire confiance à un frère doublé de fils de fellagha, à ce jeune à la tête dure et dont les prédispositions à devenir terroriste ne trompent personne. Son frère, son père, son oncle et ses neveux sont des maquisards de première heure, et tous sans exception ont été abattus, pour le grand bonheur de la France coloniale certes mais non pour ce harki qui se bat pour une cause perdue d’avance au mieux, au pire pour un idéal qui n’en est pas un.

On s’avisa, bien sur , vite de l’isoler du reste du groupe de civils kabyles réquisitionnés pour cette opération - le harki Mohand Précisait de plus en plus sa menace de tuer mon frère dans le cas ou il ne coopérerait pas.
Il s’adressa à lui en ces termes, pour, d’abord le terroriser :
- « Avec la volonté de Dieu, ce sera aujourd’hui ton dernier jour. tu ne reviendras pas vivant de cette opération. je te le promets »

La réponse de mon frère ne s'était pas faite attendre et , le moins que l’on puisse dire est qu’elle était chargée de toute la rage et du dégoût que l’on doit à cet ennemi , le colonialisme français ,qui l’avait déjà privé de tous les soutiens dont il pouvait avoir besoin dans pareilles situations de guerre : son frère Chérif tué en 1957 au village Mahmoud , son père Hanafi , froidement assassiné , sa tante Zineb , tuée dans une embuscade ,à Ait Ouatas lors de l’opération jumelle, son oncle Mohand Ouamar tué dans un accrochage non loin de Bouessaoud , à la même époque , son neveu Mbarek également tué dans une embuscade non loin de ichariden en 1960.
Sa voix se fit alors défiante, entrecoupée de sanglots, il perdit à ce moment, toutes ses inhibitions devant cet ennemi ignorant le bon sens et la logique des choses. Il cracha alors son dégoût dans un ultime courage d’un jeune homme dont on s’attelait à briser la personnalité, la virilité, l’existence même en tant qu’homme. Son équilibre psychologique risquait alors de prendre un coup, et il ne pourrait s’en remettre de cette épreuve qui était faite pour le marquer à jamais, s’il s’en sortait vivant. C’est le traumatisme irréversible, ce que les stratèges coloniaux font passer dans leur opinion publique en usant de termes cyniques, effrontés et éhontés : les dégâts collatéraux.
Il était dans un état second , et il avait un instant perdu tous ses freins psychologiques,et dans une sorte de prière adressée à Dieu ,pour une dernière fois , s’adressant au harki qu’il arrosa copieusement de paroles assassines ,mais néanmoins venues du fonds du cœur :
- « Si Dieu le veut bien, tu périras avant moi ! Oh Mohand T. Je suis très confiant en Dieu, et quelque chose me dit que tu seras mort avant moi. Donc je survivrai bien longtemps à toi. Tu auras tout le temps de le vérifier ». En effet, la suite des événements, et l’avènement de l’indépendance nous confirmerons que cette prière sera non seulement entendue mais qu’elle sera exaucée dans des conditions horribles. Dieu n’a t-il pas été clément envers les égarés ou bien a-t-il réservé au péché le châtiment idoine ?
A cette réplique Mohand T réagis avec stratégie pour se venger de ces offenses venant d’un fils de fellaghas, d’abord en encaissant le coup, et ensuite en tentant d’exposer sa victime à la vindicte des harkis, fsna et fse tous confondus. Les soldats présents, emportés par le manége de Mohand T qui avait mis toute la force de ses arguments et son énergie pour attirer la méfiance sur lui en le présentant comme un fils, également un frère, ensuite un neveu de fellaghas. puisque toute la famille est considérée « famille de fellagas ». En effet cela se justifiait amplement dans les faits. Les arguments que ce harkis haineux avait déployés ne nécessitaient pas trop d’efforts et valaient autant de preuves irréfutables, pour être acceptés, avalés même sans difficulté par cette bande très encline à tuer tout ce qui leur paraissait à leurs yeux, de prêt ou de loin, ressembler aux fellaghas, dans ce bled qui, pourtant les a vus naître et souffrir et grandir.
Il finit donc par faire admettre aux autres soldats que ce jeune Abdallâh n’était autre qu’un indicateur des « fels » (5), et donc un futur fellagha en puissance.

(5) Fels : diminutif de fellaghas : mot utilisé par les colonialistes pour designer les maquisards algériens. les artisans de la colonisation usent beaucoup de termes méprisants comme : fellouzes, les rebelles, les terroristes.

On isola abdallâh des autres et on l’attacha à un des ânes qui ont servi à transporter les munitions et les provisions alimentaires sur les lieux où se déroulait le bouclage.
toute la nuit durant , tout ce monde attendait le lever du jour pour lancer une offensive sur les éléments FLN , encerclés depuis déjà plus de 24heures, retranchés dans ce trou qui surplombe la position des militaires de l’armée française., sans que ceux ci puissent les atteindre.. Un véritable siège qui a duré jusqu’au matin.
Les 3 maquisards ne pouvaient alors s’échapper du trou dans lequel ils s’étaient terrés. A ce moment, les éléments qui encerclaient la grotte se mettent à attaquer nos 3 djounouds usant d’un feu nourri de toutes leurs armes y compris le gaz asphyxiant.
« Les rebelles » acculés sans doute par la puissance de feu et bientôt la raréfaction de l’air à l’intérieur de la grotte à cause de la fumée qui avait envahi l’atmosphère. gênés dans leur respiration par les gaz,ils se sont mis à tirer presque au hasard et subitement, nous voyons, l’un d’eux surgir du trou de la grotte, donnant l’impression d’être éjecté, propulsé par une catapulte. Il fut accueilli en l’air, par un feu nourri. Et pendant qu’il culbutait dans l’espace, il tressautait à l’impact des balles des armes qui continuaient à déverser sur lui un déluge de feu. Il continua son vol plané sur une distance de plus de 100 mètres pour atterrir dans une cuvette, une sorte de bassin rempli d’eau de rivière d’une profondeur de 1 mètre.
On pouvait alors très visiblement distinguer le corps de cet homme de corpulence, Ouazzeddine, un natif de Taourirt BOUDHELES, un village non loin de TIFILKOUT.
Mitraillette aux poings, il atterrit au sol la tête en bas et les pieds en haut, au bord du bassin du roumi, en kabyle thamdha ouroumi (6) sa mitraillette lui ayant échappé des mains ira se flanquer contre le talus, quelques mètres plus haut que son corps terrassé par les balles assassines qui ne cessèrent de lui transpercer le corps.

(6) Thamdha Ouroumi : traduit littéralement : la mare du Roumi, un espèce de bassin naturel formé dans l’oued Tirourda. À cet endroit la profondeur de l’eau pouvait atteindre pus d’un mètre.

A ce moment, Plus aucun tir, un silence macabre envahit l’atmosphère. On obligea alors mon frère à descendre au fond de la rivière ou gisait le corps inanimé du moudjahid.un homme robuste ,80 kg, beau, perdant son sang dans le bassin débordant d’eau de rivière. Il devenait de plus en plus clair,et sa peau prenait une couleur argentée, en même temps que son visage s’illuminait,pour donner l’impression d’un enfant qui dormait d’un sommeil tranquille, un bébé détendu , à qui ne maquait que le sourire pour rayonner de toute son innocence et sa splendeur. Il venait de nous quitter, pour de bon, et les multiples tentatives pour le remonter au niveau du groupe qui juchait au-dessus de la tête de Abdellah, mon frère, ont été vaines tant cet homme paraissait, à cause de l’effet de l’inertie, peser plus de 200 kg. d’une part , et le relief escarpé ; ne permettait même pas d’essayer de crapahuter avec un poids de cette taille sur le dos, d’une autre part.
On commença alors à lapider mon frère du haut du talus, en se moquant de lui.
Pendant qu’il essayait en vain de remonter ce corps qui, maintenant a perdu tout son sang et, devenu très clair et brillait à la lumière du jour, on dirait un poisson argenté qui scintille aux rayons du soleil, on ordonna à mon frère de desserrer la ceinture du mort et de récupérer ses rangers.Ce qu’il fit sans protester.
Pendant ce temps, les harkis continuaient de lapider, en bas, mon frère. On lui demanda de reconnaître le fellagha.en vain. Mohand T s’improvisa alors meneur de l’interrogatoire :
- « le connais tu ? » demanda t il à mon frère.
- « non ! » lui répondit il, sèchement.
Vers 10 heures trente, arriva alors sur les lieux, le lieutenant Boucher en provenance du camp….
Il vint immédiatement aux informations.Un compte rendu rapide lui fut fait par les harkis zélés. Et c’est à qui narrer les faits le plus promptement au lieutenant. : 3 MORTS, dont 2 par asphyxié à l’intérieur de la grotte. Tous fellaghas armés. deux seront vite identifiés par nos villageois sans que les militaires n’aient obtenu de précision : Hormis celui dont nous avions parlé plus haut , enl’occurrence Ouazzeddine , le deuxième , Ali serait d’origine de Ait NZER , un village non loin de Ahdouche.Quant au troisième personne ne pouvait donner une quelconque indication à son sujet.Observant la situation lamentable dans laquelle se trouvait ce jeune kabyle de 17 ans, mon frère en l’occurrence, Le lieutenant qui venait d’arriver a vite compris qu’il pouvait être en danger de mort. , en voyant l’acharnement des soldats fsna.il ordonna alors à tous les soldats de cesser ce manège. Quelques Imnouchens continuaient cependant de lapider donnant l’impression de se ficher royalement de leur supérieur.
Pris dans un accès de colère, le lieutenant menaça alors quiconque continuerait de lui désobéir. il ordonna que l’on cessa toute agressions contre mon frére.il prit alors l’initiative du commandement et demanda du haut du talus, à Abdellah , pendant que ce dernier continuait à tenir compagnie au cadavre du fellagha : « est ce que vous pouvez comprendre ce que je peux vous dire ? ».MOHAND T s’empressa de traduire en kabyle les paroles du lieutenant en assortissant ces paroles de menaces. « Il te demande est-ce que tu vas répondre à ses questions en disant la vérité ? »
Réponse de mon frère Abdellah en kabyle :
- « mon lieutenant, il veut me tuer ! »
Le lieutenant Boucher :
- « demande lui de choisir quelqu'un pour lui traduire ce que je dis ».on lui expliqua ce que venait de dire le lieutenant .Il s’empressa, cependant de répondre toujours en langue kabyle :
- « expliquez à mon lieutenant que je ne peux accepter comme interprète ni Mohand T ni Y.M, Ni BM, »
Le lieutenant :
- « alors qui veux tu prendre comme interprète pour te faire comprendre ? ».Et mon frère Abdellah de répondre :
- « je veux que ce soit Mohand Ouidir Ath M qui traduise ce que je dis au lieutenant et qui m’explique ce que me réponds le lieutenant" »
Alors le lieutenant commença à poser ses questions
- « pouvez vous reconnaître le corps de ce fellagha mort qui est devant vous ? »
Le supplétif MOhand Ouidir Ath M traduisit cette phrase non sans encourager mon frère :
- « Écoute !il te demande si tu connais cette personne qui gît devant tes pieds, vas y parle ! Ne soit pas effrayé. Tu n’as rien à craindre. J’arrangerai la traduction. Il te suffit de remuer les lèvres, le reste je m’en occupe »
En même temps qu’il traduisait Mohand Ouidir Ath M. encourageait mon frère.Reprenant son courage à deux mains, mon frère finit par dégeler sa situation et se mit à déverser toute sa rancune sur ce supplétif, qui lui avait jusque là rendu la vie très dure, en l’occurrence Mohand T, puisque l’occasion d’or venait de lui être offerte par ce harki et non moins patriotique Mohand Ouidir ath M.
Pris dans cet élan sentimental, il finit par se hasarder dans une aventure de discrédit du terrifiant Mohand T.
- « écoute Mohand Ouidir Ath M , je te demande de traduire intégralement ce que je vais dire au lieutenant Boucher , que j’ai été frappé et menace par Mohand T. dis lui qu’il a juré de me faire la peau, vas y traduit, je t’en supplie Mohand Ouidir ! »
Sans attendre la traduction, le lieutenant avait saisi quelques mots qui pouvaient suffire pour comprendre le danger qui guettait mon frère. Suite à cela, il ordonna ferment à tous, en martelant ses mots :
- « je vous avertis cette fois, que s’il lui arrive quoique ce soit à ce jeune, vous me le payerez très cher ».
Le lieutenant savait tout sur mon frère. Quand on est lieutenant de SAS, inutile de se faire narrer que ce jeune Abdellah était bel et bien issu d’une grande famille de fellaghas. Il savait que le qualificatif dont l’affublait le Harki , le futur fellagha , disait il à qui veut l’entendre, n’était qu’une psychose d’un individu qui se sentait rangé du coté d’une cause qui n’était pas la sienne, et, qui plus est, cette cause ne pouvait le servir dans l’avenir. Mohand T avait senti, ce jour que le pouvoir ne lui appartenait pas et que ses méfait, sa capacité de nuisance étaient, tout de même, limités par L’ordre colonial qui, lui, avait un autre objectif, un autre dessein que de satisfaire l’esprit agressif et belliqueux d’un kabyle faible d’esprit, ignorant ses origines et n’envisageant aucune perspective claire d’avenir pour ses propres idées si tant est qu’il en avait quelques unes.
L’histoire retiendra également que ce supplétif zélé ne profitera pas des effets positifs de la France coloniale


Extrait du livre « Kabylie : la guerre vécue »
1954-1962

Du même auteur :

1. fils de fellagha
2. La guerre franco algérienne dans la poésie populaire kabyle
3. la guerre vécue par un chasseur alpin en kabylie
4. les troupes du colonel Amirouche
5. la Kabylie : la guerre vécue-1954-1962

www.publibook.com

Écrit par : si hadj mohand | 27/03/2008

Instantané de la guerre de libération
EL WATAN 20/01/2008

Je me souviens très bien de ce jour, vers les années 1960. Alors que nous campions tous ensemble, mes frères et mes cousins, au champ dit Tamazirt – sur le versant sud du village Iferhounène – à 150 m seulement face au camp du même nom.

Nous étions en train de garder l’unique chèvre qui restait de notre bétail, de notre fortune laissée par nos parents, happés par le colonisateur, lorsqu’une compagnie complète composée de soldats français d’origine européenne et de quelques harkis notoirement connus passait juste devant nous, en colonne, en direction de leur bivouac.
Le hasard n’a pas pu éviter l’événement sempiternel de se produire à ce moment précis, cette chamaillerie qui mettait souvent aux prises, de façon presque cyclique tel un syndrome pathologique, mon cousin Yazid, 10 ans à peine et, son frère Messaoud, 8 ans.– la bataille faisait déjà rage entre les deux frères ennemis quand les premiers soldats venaient de franchir l’endroit où nous étions surpris par cette file indienne de roumis égrenée de harkis. Messaoud, mon cousin l’intrépide, le nerveux aux réactions épidermiques, a la mémoire prodigieuse – il avait tout de même et surtout une facilité déconcertante à retenir les noms des personnages célèbres ou de ceux de larrons que des événements ont rendus tels, à des occasions exceptionnelles.C’est ainsi qu’il pouvait retenir dans sa petite mémoire d’enfant indigène non seulement tous les noms des harkis de la région mais aussi et particulièrement des hauts gradés du FLN et de l’armée française de l’époque – nous étions déjà en 1960 – et notre enfant terrible n’avait que 8 ans – soit deux ans de moins que nous-mêmes. Des noms comme celui de De Gaulle, de Lacoste, ou encore Eisenhower (Américain) n’avaient aucun secret pour lui.
Messali Hadj, Abane Ramdane ou autres, non seulement il les connaissait très bien mais il pouvait leur adjoindre les caractères saillants de leur personnalité, de leur physionomie. Ainsi, De Gaulle, pour lui, était très long et avait un nez qui était hors du commun. Il disait souvent pour ironiser à quelqu’un qui le contrariait qu’il avait le nez de De Gaulle. Ou bien encore les yeux de tel autre personnage. Mais celui dont il finit par adopter définitivement le nom pour en faire une idole, au point de ne jurer que par sa tête, était le redoutable Amirouche, connu sous le surnom deu Lion du Djurdjura – pour lui les héros ne meurent jamais, quelle que soit la puissance de leurs ennemis. Cet enfant intrépide, qui ne se souciait de rien, n’a pas raté l’occasion inespérée, à ce moment précis, à l’endroit même où la compagnie venait de passer devant nous à quelques mètres seulement, pour se mettre à gueuler en vidant sa colère incontenable sur son frère qui le taquinait, en ces termes, à très haute voix et de façon très distinctive : « Je jure sur la tête de Amirouche que je vais te tuer, oh Yazid de m… ! Je vais d’écrabouiller ton portait de Mohand ath M., harki ! Va, tu n’es pas mon frère, tu es plutôt le frère à Ouali Ath O. ! » Cette avalanche de mots, débités sans interruption à voix porteuse, n’a pas manqué d’attirer le regard de tous les soldats qui étaient à proximité du lieu où se déroulait la bagarre entre les deux ennemis et non moins frères de père et de mère. A cet instant précis – et comme à la parade, tels des joueurs de baby-foot guidés par le même mouvement – tous les regards se tournèrent brusquement vers l’endroit d’où fusait ce terrible nom de Amirouche, d’une voix aigue et vibrante en même temps. Une sorte de réflexe conditionné avait saisi subitement la file de soldats qui s’étaient retournés comme s’ils s’apprêtaient à découvrir soudain ce redoutable guerrier en face d’eux, surgir de derrière un arbre, ou à travers un mur de ces mechtas alignées face au camp. J’avais deviné que tous les soldats F.S.E et F.S.N.A, tous grades confondus ou simples hommes de troupe, connaissaient parfaitement le terrifiant nom de Amirouche. Enfant indigène de surcroît inculte que j’étais à cet âge car, privé de tout, j’avais vite compris l’ampleur du combat que livrait ce redoutable guerrier à une puissance pourtant surarmée. J’ai surtout compris que la suprématie, dans un conflit armée, ne résidait pas seulement dans la puissance de feu mais qu’aussi dépendait de l’audace et de l’intelligence des chefs militaires.
En un mot, de la stratégie dans la manière de livrer bataille à son ennemi. C’est cela la guérilla. L’onde de choc qui s’était répandue au sein de cette compagnie était telle que, nous, enfants insouciants, étions d’un coup saisis de perplexité – une atmosphère de méfiance, inexplicable, contagieuse s’était soudainement répandue autour de nous, suivie d’un silence effrayant tant du côté de tous ces éléments de l’armée d’occupation que du côté de ces enfants indigènes que nous étions – tous âgés entre 7 et 10 ans. Nous avions tous compris à ce moment-là, soldats français et enfants de fellaghas que nous étions, qu’un monde séparait nos deux cultures, et surtout nos deux philosophies, nos deux religions. Ils sont les envahisseurs, nous sommes les autochtones, les propriétaires des lieux. Ils sont là pour nous asservir, nous exploiter, nous voler, nous martyriser. La terreur du colonel était le remède au système inique, violent, criminel, qui s’installait progressivement dans notre pays. Cela fait 4 ans déjà que le camp d’Iferhounène a été installé chez nous, la situation allait pour nous de mal en pis : frères et pères tués, oncles emprisonnés, biens saccagés, il ne subsistait pour nous que les chamailleries de frères et sœurs livrés à eux-mêmes et sans ce précieux intermédiaire conciliateur, nos pères. Il ne restait pour nous que la guerre, sans autre issue que la mort. Mon père avant de mourir nous a légué cette phrase lapidaire : « Maintenant que Amirouche est mort, qu’il ne subsiste aucun d’entre nous ! Mourrons tous, car c’est l’unique alternative qui nous est laissée. Le colonialisme vit au détriment du colonisé. Il l’avilisse, il le martyrise, il l’appauvrit, en un mot le détruit progressivement. » Nous, enfants indigènes et aussi enfants de fellagas, étions prédestinés à une autre vie, pas celle de pacifiés, assimilés aux Européens. Nous sommes mis dans un état de rébellion pathologique par les conditions de dénuement total qui nous sont imposées par l’envahisseur. L’école française que nous avions commencé à fréquenter n’a fait que réveiller en nous les braises d’un feu mal éteint : la haine de celui qui nous a privé de tout : d’abord de l’affection de nos pères, ensuite des moyens de survie. Nos biens ont été lapidés et nos maisons confisquées. La puissance coloniale aura réussi à reproduire en nous, enfants innocents, ce que, eux, appellent par confusion délibérée, préméditée, des futurs terroristes que par conséquent, il faudra, tôt ou tard, penser à éliminer. Des rebelles à vouer à la corvée de bois. La corvée de bois ! Quelle subtilité barbare ! Comment l’esprit d’enfants d’indigènes insouciants peut-il admettre que l’on puisse montrer sa force, sa puissance devant un homme sans arme et, par-dessus tout, faire croire à l’humanité toute entière, à l’histoire de l’homme, que le condamné, victime d’une exécution préméditée, sans aucun jugement, qu’il a tenté de fuir. Pis encore, l’infortuné est tué avec cet espoir d’être libéré pour retourner à ces enfants chéris qui l’attendent pour continuer à vivre. Comment des dirigeants d’une puissance militaire, d’une nation qui a vu naître et grandir les droits de l’homme, puissent-ils admettre que de tels crimes aient lieu sous leur commandement ? Peut-être avaient-ils été les commanditaires ? Quelle grandeur pourrait-on reconnaître à ces stratèges politiques et militaires qui ont été formés dans les écoles de Victor Hugo, Ronsard, Montaigne, Voltaire et Pascal ? Mon Dieu, quelle sauvagerie est cette culture occidentale ?! Et ces soldats français, dont la plupart avaient moins de 30 ans, peut-être à peine 20 ans, malgré proches de nous, en tant qu’êtres humains pensants, n’avaient-ils pas d’autres alternatives que celle de nous réduire à néant. Ils étaient en fait conditionnés pour cette mission. Il ne faut pas leur en vouloir, car moi-même j’ai été jeune, et de surcroît orphelin et fils de fellagha, je ne suis pas un saint, et pourtant, je me souviens que mon seul péché était de dévaliser l’école primaire de ses plus jolis livres pour en arracher les images. Rien que cela. Je n’ai pas tué et préfère pour cela mourir que de mettre fin à la vie d’un être humain. Ces jeunes Français appelés sont, pour la plupart, comme moi, j’en suis sûr. Pour preuve, des soldats dont je n’ai retenu que le prénom ont pris notre partie. Guy, Marcel, Robert, Madame Boucher, femme d’un non moins lieutenant de la SAS étaient des soldats français FSE. Ils nous ont protégés et protégé nos mères et nos sœurs. Cette compassion des appelés français, enseignants, m’a évité de faire la confusion plus tard entre les crimes, les nazis et les soldats français et réussit à faire la part des choses. De ce côté-là, paradoxalement, tout en étant musulman entier, j’applique le commandement qui est pourtant adressé aux chrétiens : tu ne tueras point ! Ces soldats FSE prendront assurément conscience de leur erreur plus tard… quand le moment de la remise en cause inéluctable viendra. L’heure de vérité sonnera pour eux quand ils seront proches du tombeau et feront leurs adieux aux vivants ici bas.
Mais que dire alors des harkis qui ont choisi, volontairement, ou sans se rendre compte, de se positionner contre leur propre peuple, leurs propres frères, pour défendre une cause perdue d’avance, une cause injuste, des intérêts d’une nation en proie aux difficultés socio-économiques. Et même les citoyens français, engagés temporairement, n’arrivaient pas à justifier vis-à-vis de leur conscience leur engagement, leur prise de position en faveur de l’Algérie française. Ils étaient et continueraient à mourir pour certains pour des idéaux, des enjeux qui ne les touchaient ni de loin ni de près. Ils servaient un système qui perpétuait la domination et la servitude des hommes favorisés et bien servis par le système non moins exploiteur, non moins injuste et non moins ingrat déjà à l’égard de ses propres membres qui s’efforcent en vain de croire, malgré eux, en l’honneur de la France dans cette affaire d’extermination d’autres hommes, d’asservissement d’autres femmes et d’enfants d’un pays soumis par la force et la tyrannie, le leur qui leur a volé leur jeunesse, pour un résultat inutile. Pis encore !déshonorant. Pour ces Français, harkis ou fellaghas, ce sont les mêmes doigts d’une seule main qu’il faut, à défaut d’exploiter, éliminer. Le colonialisme porte en lui les germes de sa propre négation. Amirouche était devenu un dieu dans l’esprit de ces enfants indigènes, orphelins, ou privés de l’affection de leurs pères croupissant dans les geôles depuis déjà plusieurs années. Ils seront les futurs fellaghas, si la guerre venait à perdurer. Le cas de 7 enfants alignés là devant cette puissante compagnie de chasseurs alpins, avec à leur tête un lieutenant foudre de guerre, livrés à eux-mêmes, se chamaillant pour briser la domination de leurs aînés, sous l’œil indifférent de ces chefs de guerre, roumis, mais ébranlés par cette culture terroriste qui classe l’enfant indigène kabyle déjà dans sa destinée de futur fellagha, l’opposant du coup à celui des harkis. C’est cela ce que la propagande coloniale appelle l’opposition ou le conflit fratricide. Les noms de harkis tels que Doumra, Ouali Ath O., Mohand T., Mohand Ath M. étaient déjà entrés dans le langage populaire, mais comme des surnoms chargés de tout leur poids péjoratif et il n’était pas surprenant de vous entendre, en ces temps de guerre, être surnommé par des noms authentiques mais usés comme simple sobriquet. Amirouche, même mort par contre comme, disait Conroux, continuait de faire peur. C’est le symbole de la justice forte, efficace et opposée à la force tyrannique du colonisateur.

L’auteur est retraité

par Abdenour Si Hadj Mohand
Mis en ligne par le webmaster le 20 janvier 2008

Écrit par : si hadj mohand | 01/04/2008

Guerre d’Algérie
1954-1962


Les jeunes chasseurs alpins
Et
Le fils de fellagha

Par
Si hadj Abdenour@hotmail.com


« Mais les jeunes appelés étaient innocents. Jamais ils n’aient été confrontés au moindre rebelle et leur mort me navrait d’autant plus que nous n’étions pas certains en fin de compte de pouvoir garder l’Algérie à la France. Assurément, dans cette pénible affaire, le FLN, bien qu’il fut l’ennemi, me parut moins responsable dans cette tragédie que le gouvernement gaulliste qui continuait d’alimenter l’armée de l’Algérie en jeunes français inexpérimentés, lesquels tombaient dans ce pays alors que la décision d’abandonner l’Algérie était déjà prise. En toute honnêteté, contrairement à ce qui était communiqué officiellement aux parents, je considérais que ces jeunes ne mourraient pas pour la France, mais pour rien » Julien Garnier ajoutera plus loin dans son livre paru aux éditions Société des écrivains:

« Que représentait la pacification ?notre présence sur le terrain était elle vraiment indispensable ? Pour qui, pour quoi ? Et les mêmes inquiétudes réapparaissaient chaque fois que je me couchais. Quarante ans plus tard ; je m’interrogeais toujours sur le bien-fondé de ces combats que nous avons du mener, ils nous ont volé notre jeunesse, nos vingt ans, et je ne suis toujours pas persuadé que la cause que nous défendions était la bonne. Le recul nous a permis une autre approche de ces événements dramatiques et que reste t il de nos efforts, et nos souffrances ? A quoi, à qui, avaient ils servi ? Tous ces tourments n’avaient laissé que déchirements et blessures dont certains, à ce jour, ne se sont toujours pas cicatrisées. Personne ne pourra jamais apporter de réponses satisfaisantes »

Et Roger Conroux d’ajouter à son tour, dans « la Kabylie des chasseurs alpins-terre de nos souffrances » paru également aux éditions Société des écrivains :

« J’avais vécu deux longues années de crapahutes dans le djebel, à travers les massifs de la Grande Kabylie, la peur au ventre, sans le moindre répit, les hommes d’Amirouche nous tombaient dessus en embuscade, assaillaient nos bahuts et c’était à l’échelle de la compagnie, voire de la section, voire de l’équipe, et même du bonhomme, qu’il fallait sauver sa peau »
Et d’ajouter lui aussi dans le même livre, comme pour réveiller les consciences englouties par l’oubli ou le profit que peuvent procurer dans ce monde matériel le silence et la désinformation, en tant qu’instruments de management politique et d’autres générations de jeunesses innocentes seront à leurs tours sacrifiées pour des causes perdues d’avance ou pas de cause du tout :

« Girard avait tout juste vingt ans, l’age où l’on a envie de vivre pleinement sa jeunesse et non pas mourir pour une cause qui ne nous concerne guère. Ils avaient fait main basse sur toutes les provisions du village, renversant les étalages. Conscients que cette nourriture, servait à ravitailler les maquisards, ils avaient mis encore plus de hargne dans leur saccage, éventrant d’énormes potiches en terre cuite qui servaient à stocker figues, olives, huile, fruit d’une période de dur labeur, ces réserves permettaient sans doute à toute la population montagnarde de subsister pendant la mauvaise saison qui n’en finissait pas de durer. Ces actes gratuits m’affectaient toujours aussi profondément et je faisais tout ce qui était en mon pouvoir afin d’éviter ce relâchement des consciences qui transformait l’homme en bête malfaisante »

Et SI HADJ ABDENOUR, qui nous livre ses souvenirs de guerre. Son regard innocent mais juste inscrira dans sa mémoire d’une encre indélébile ce qui allait 40 ans plus tard devenir la pièce à conviction de la démence des monstres qui ont pensé , planifié , et exécuté la conquête armée de l’Algérie .La preuve irréfutable aussi , et heureusement que sur cette terre , de quelque coté qu’on se situe , existe des hommes de bonnes volontés , des hommes justes , humains et bien pensants même si,ceux-ci étaient à un moment donné,contraints de casser du fellagha,eux et qui étaient arrivés à se poser la question de vérité : qui de nous avait raison ,les envahisseurs que nous étions ou ceux que l’on appelait « les fellaghas » ?

Lisez plutôt ce que dit ce fils de fellagha


Kabylie-1959(Iferhounéne):

« Un Peloton d’exécution dirigé par le lieutenant Pelardi »

Par
Si Hadj Abdenour
Extrait « de fils de fellagha »


Temps brumeux, climat glacial en ce début d’hiver 1959, à Iferhounéne, un village perché sur un mamelon face à l’imposante chaîne du Djurdjura , couve un événement dramatique sous l’occupation de l’armée française..
De gros nuages gris et blancs, comme à l’accoutumée en cette période de l’année, couvrent le ciel en donnant l’impression d’un couvercle sur le point de se refermer sur cette cuvette escarpée des tribus quinqué genti, aujourd’hui les ath yetsoura (ITTOURARS).
Cette région visitée dans le passé lointain par des conquistadors européens , mais jamais conquise complètement y compris dans les années 1854 ;1856 et 1857 par les armées de Constantine et de Bordj Tizi Ouzou conduites par les maréchal Randon et les généraux Mac Mahon , Yusuf ….
Nous sommes en 1959. La Kabylie est maintenant soumise totalement à la domination de l’armée coloniale et la population fait l’objet d’une étude minutieuse, d’une observation méticuleuse, mais sur le terrain les troupes du vaillant guerrier Amirouche continuent de harceler les nombreux camps qui egrennent les mamelons de ce territoire des amazighs, hommes libres et fiers.
La population civile , même réduite grandement dans ses mouvements, continuait de vaquer à ses occupations sous l’œil vigilent des quatre sentinelles placées au quatre coins du camp militaire installé depuis 1956 à l’emplacement même du lieu réservé aux commerces de cette population spolies de ses propres magasins.
De ces reliefs escarpés et boisés il ne reste plus que les pâtés de maisons formant maintenant de véritables cités dortoirs des kabyles, une fourmilière sans provisions stockées, entourée d’un barbelé qui l’intègre ainsi à l’environnement du camp.
Mon oncle Arezki ,en rejoignant ce pâté à pieds, sur le point d’atteindre le village, sur son chemin en dépassant la fontaine fraîche « thala bouda » tout près du camion calciné,par je ne sais quelle lubie , fonçant droit subitement sur le premier rencontré sur son chemin , qui se trouvait être par hasard un enfant de mon age que je connaissais très parfaitement , lui flanqua en pleines fesses son 42 fillette , avec cette rare violence qui ne pouvait qu’expédier à vol plané sur une dizaine de mettre, à contrebas de la route carrossable, ce petit enfant de la taille d’un ballon de rugby. Le coup a été évidemment bien ressenti, mais heureusement sans conséquence dramatique pour cet enfant de 9 ans qui, 50 ans après l’incident s’en souvient comme si cela datait d’hier.
L’ampleur de la rancune qu’a gardée mon petit ami Saadi Ait El Hadj envers mon oncle Arezki, sera ouvertement dévoilée devant le cadavre allongé saignant , face contre la terre , un trou dans la tête et qui n’a pas trouvé mieux que ces termes infantiles , innocents, inconscients à la fois « chah ! Chah ! C’est bien fait pour toi ! Je suis très content que ça se termine pour toi ainsi .tu m’as donné un coup de pieds, peut être avais- tu raison de frapper mais tu t’es trompé de victime .je suis certain que tu n’as pas agi gratuitement mais ton agresseur ce n’est pas moi, te connaissant tu as du être victime d’une confusion. , un voyou sans doute t’a mis dans cet état….. »
Saadi avait tout compris. Arezki a du subir une provocation d’un enfant voyou, ou bien, est-ce que, la suite des événements pouvait tout expliquer. Inconsciemment, avait- il cherché à calmer ses nerfs sur un enfant sans défense .Putain ! Aurais-je pensé à sa place, en me mettant un instant dans la logique du roumi en même temps, pour tenter de donner une explication toute personnelle et singulière à cette extériorisation passagère d’agressivité, somme toute psychopathologique : « chien de jeune, tu vas vivre longtemps ! Moi, je suis condamné, on vient de me vendre aux roumis ! »

Le lieutenant Pelardi est un homme de corpulence et de haute taille. Agissant sur instruction de ses supérieurs restés dans l’ombre, le commandant Favier, son adjoint Wolf qui l’ont désigné, en raison de sa personnalité et sa solide conviction en l’Algérie française, ou si je me trompe dans ce cas, il s’est donné une autre ambition, une vocation à courrir après les gallons, en marchant sur des cadavres, pour diriger l’impitoyable section qui aura pour charge de mater la population d’iferhounene.
Cette section qui compte en son sein des harkis notoirement connus pour leur violence, a fait beaucoup parler d’elle, dans le mauvais sens bien sur. Les femmes, les vieilles, les hommes et les enfants connaissaient Pelardi et ses hommes de mains .moi même j’ai eu à maintes reprises à entendre parler des exploits de ce sinistre individu. tenez par exemple lors de notre expulsion du village début de l’année 1959, le capitaine Favier avait menacé de mettre à nos trousses la section de triste réputation de Pelardi pour s’adonner sur notre famille , aux exactions et humiliations dont il en maîtrisait parfaitement l’art et la manière. Le message était bien perçu puisque il ne nous avait fallu pas plus de 10 minutes pour quitter nos maisons, au lieu du quart d’heure qui nous avait été accordé. Nous avions quitté le village les mains nus, pour ne pas tomber dans les mains de ces charognards de harkis. La panique a frappé sélectivement la famille car c’est dans le camp que se décidaient toutes les actions, en présence bien entendu d’un effectif nombreux de harkis et de goumiers. Ces derniers étaient plutôt connus pour leurs violences gratuites sur des femmes soupçonnées de servir les fellaghas.
Enfants insouciants et innocents, la colère et la trouille sont devenus notre pain quotidien. En sortant du village à quelque mètres du barbelé qui cerne le village, l’impression de liberté que nous avions ressentie est vite effacée par ces phrases assassines prononcées par des soldats français de souche européenne reconnaissables à leur accent « a yefehounene, aya ats tcham izzan » traduit en kabyle cela voulait dire « habitants d’iferhounene venez manger de la merde ! Rien que cela, les leçons que les harkis ont apprises à ces jeunes français pour nous narguer comme si la précarité de la vie n’était pas suffisamment dure à supporter, pour nous,enfants affamés, terrorisés, agressés.
La section de Pelardi était là, alignée au dessus de nos têtes quand nous commencions à franchir les ruelles étroites qui séparent les dernières mechtas de Tamazirt, au sud du village, pour s’assurer que les ordres donnés par WOLF et consorts étaient appliquées à la lettre. En d’autre termes que ces femmes, ces vieillards et ces enfant en très bas âge ont obéi aux injonctions de quitter sans délai le village,pour être livrés toute la nuit durant aux broussailles , aux ravins , aux rochers , aux animaux sauvages qui pouvaient à tout instant les surprendre. Pour aller où ? Qu’importe, pour les gradés du camp, l’essentiel pour eux que cette famille de fellaghas quitte immédiatement le village, avant 17 heures. Le reste, c’est connu : « ils doivent rejoindre le djebel » comme si la forêt pour eux était un lieu de villégiature pour les bambins indigènes qui n’ont besoin ni de feu pour se chauffer, ni de nourriture, ni de soins. En somme, pour les stratèges de la France coloniale, un enfant indigène ne mérite aucune minute d’attention dans cette entreprise de grande envergure de pacification, de civilisation universelle pour laquelle de jeunes français innocents, à la fleur de l’age sont sacrifiés comme des moutons de l’Aïd. On dira à leurs parents par la suite qu’ils sont morts pour la Douce France, en héros, tués par la horde de sanguinaires d’un chef de bande du nom de Amirouche. Que n’a-t-il pas sacrifié cet assoiffé de sang, de ses concitoyens, pour lesquels la France civilisé se révolte. C’est dire que méme das le droit de donner la mort aux autres, la France se devait de garder le monopole, car, la France cultivée, civilisée, la France des droits de l’homme ne tue pas n’importe qui.
Après nous avoir expulsé du village, pour le motif que nous étions une famille de fellaghas, les gradés du camp d’iferhounene allait donc poursuivre leur mission de pacification du village, encouragés pour cela par certains écervelés de harkis, du genre Mohand Tizi (ou Mohand Ait El Mouhoub du village de Tizi guefres)qui continuait d’ailleurs, même après son arrestation à l’indépendance,largué par ses maîtres, à croire que toute la population d’iferhounene était acquise à l’idée de l’Algérie française.
Ils décidèrent donc de passer à l’action après avoir éliminé la famille la plus récalcitrante de leur champ de vision, livré à l’exil, à la faim et l’insécurité, ses membres éparpillés à travers les villages Ait Ouatas, Taourirt, Tikilsa. Notre famille, une véritable smala d’Abdelkader, composée de 40 membres dont 21 enfants .Ces enfants, pouvaient ils représenter pour les desseins de la propagande coloniale un danger ? Garçons et filles dont l’âge se situait entre quelques mois et 15 ans. Ce risque majeur était-il du coup, définitivement écarté après cette mesure préventive? La classe d’âge de la majorité de ces petits « voyous » à laquelle j’appartenais ne dépassait guère les 9 piges.
Le choix sera, immédiatement après notre éclipse des regards des militaires du camp, porté sur deux personnes qui, selon les accusations qui ne manquaient pas pour trouver le prétexte aux nouvelles exactions, tortures et assassinats, étaient des collaborateurs du FLN.
Il s’agit de mon oncle Arezki et Belkadi Boussad qui, eux, n’étaient pas encore astreints à vider les lieux, car non connus pour l’instant du service de renseignements alimenté en fait selon l’humeur, par des lâches trahisons, ou esprits de vengeance personnel des harkis du camp.
Des éléments de ce sinistre camp capturèrent les deux hommes, avec la facilité que l’on sait car, ces personnes n’avaient aucun motif de se soucier de leur vie, du moins rien ne pouvait justifier leur fuite, leur emprisonnement, encore moins leur exécution. Quant à leur éventuel et préalable jugement, c’était selon l’expression bien de chez nous comme si « on demandait l’arbitre d’un roumi quand on est victime de son frère qui est également roumi » c’était un non sens que d’attendre un jugement équitable de l’occupant.
En tout cas, conduits tous deux au camp, après quoi on les attacha avec des cordes, et leur banda les yeux.
On les emmena à l’extrémité Sud Est du village au lieu dit « le chêne de Mnea », en traversant le village, les harkis s’affairaient à exécuter l’ordre qui leur était intimé de faire évacuer toute la population pour la rassembler sur le lieu indiqué.
Rien n’augurait de ce qui allait se dérouler pour le moment, malgré l’atmosphère lugubre qui régnait dans cet endroit attenant au cimetière du village.
Là , les yeux bandés, et les mains attachés, le dos tourné au culminant piton de Azro Nt hor, face à cette miséreuse population sans âme , alignée dans le sens Nord Sud devant l’imposante chaîne du Djurdjura.
Une population disparate composée essentiellement de femmes et enfants et de quelques vieux croulants sous l’age et la sous alimentation…..une population qui n’avait jamais assisté dans son histoire à ce genre de rassemblement, et qui n’a jusqu’ à cette minute précise rien compris à ce manège. Elle n’avait porté aucun soupçon sur les intentions réelles de ce gradé français, qui, au contraire, donnait l’impression d’un homme civilisé, intelligent et affable.
Le suspens est complet et chacun essayait de deviner ce que leur voulait ce groupe de soldats muets, à l’air pourtant martien. Certains, villageois, avaient un léger soupçon mais pas au point d’imaginer qu’un drame était en train de se préparer devant leurs yeux et que rien ne pouvait en suspendre l’exécution. La machine à tuer s’est mise en branle.
Les soldats alignés comme à la parade devant ces petites gens, face à ces deux suppliciés , vont maintenant être réglés dans un compte à rebours effroyable…..un chronométrage pour une action qui s’inscrira dans l’histoire de la glorieuse France et de l’Algérie pacifiée.
Soudain, comme dans une préparation d’une mise en scène d’un film, précédant une action spectaculaire, les dernières retouches du décor achevées, un silence mortel s’installa subitement à percevoir le bruit de la respiration des suppliciées figés comme des momies devant tout ce monde, aveugles et sourdes, car empêchés de voir, et d’entendre, par les bandeaux et le silence qui les privant de l’écho des voix humaines.

Savaient- ils ce qui les attendaient ?
Personne à mon avis ne savait d’avance ce qui allait se produire. Un fait inédit dans ce patelin appartenant au siècle dernier.
Le bouillant lieutenant, l’air devenu encore plus grave par l’imminence de cet événement fatidique, donnait plus l’air de vouloir justifier, qu’expliquer ce qu’il allait ordonner à ses subalternes, pensant sans doute laver sa conscience par anticipation de ce qui, peut être, allait lui rester sur la gorge, son acte volontaire, sans aucun jugement d’autrui. ni force opposée et qui en revanche, ne pouvait être qualifié que d’ignoble exécrable, insensé, pervers vu du coté des villageois.
En rompant le silence qui régnait jusqu alors, la voix du bouillant lieutenant a eu pour effet de faire braquer simultanément les regards de tous ceux qui étaient présents sur les lieux, pour tendre l’oreille aux lèvres de ce roumi, et malgré la martialité du ton, ils ne comprenaient rien à ce qu’il disait. Ce qui ne pouvait rendre la situation que plus macabre encore.
Il débitait, sans se faire comprendre les premières phrases que le harki AMEZIANE AA traduisait au fur et à mesure mais non sans avoir observer un temps de réflexion qui lui permit de se mettre dans le contexte de sa langue maternelle, le kabyle. La portée militaro politique du discours n’avait pas permis aux villageois de deviner la suite de l’événement à travers ce qu’il pouvait supposer comme conséquences, menaces avant exécution.

« Habitants d’iferhounene, a t-il commencé à lancer.
« Dois-je vous rappeler encore une fois que j’avais averti, pour ce qui me concerne, que toute personne qui serait prise entrain de collaborer avec les fellaghas sera châtiée. » Le harki commençant de traduire, à ce moment tous les regards sont braqués sur cette source familière qui s’exprimait dans leur langue, en kabyle mais pour leur signifier que la situation est grave. Les habitants qui étaient encore sous le choc et l’effet de l’incompréhension, sont secoués dans leur sommeil diurne, un peu comme les somnambules
Il continue « je vous avais tous averti à plusieurs reprises et j’avais même fermé les yeux sur beaucoup de cas qui m’avaient été rapportés. Malgré mon indulgence, certains d’entre vous continuaient d’ignorer délibérément mes avertissements. C’est le cas de ces deux individus que vous voyez à cet instant devant vous. Je vais vous montrer ce que l’on fait de ceux qui n’écoutent pas nos ordres. Tant pis pour ceux qui ne veulent pas obéir » la fonction du traducteur s’arrêta nette à cette dernière phrase.

Puis le ton militaire, martial, se tournant vers le peloton continue tout seul sans l’aide du harki, pour se faire comprendre :
« A mon commandement …………..feu ! »

La panique générale s’était emparée de l’assistance.
La première victime , en l’occurrence mon oncle Arezki, touché par une balle au niveau front, chéchia éjectée à quelque mètres , avant de tomber sur la face comme s’il allait se prosterner dans une dernière prière de musulman
Quant à Belkadi Boussad, il donnait l’impression de se coucher subitement sur le flanc droit comme s’il cherchait à se reposer de la fatigue due à sa station debout.
A ce moment précis, comme si la douleur de la population n’avait atteint son paroxysme, le harki AAO se rapprocha des deux corps sans vie, car le cerveau foudroyé, pour donner le coup de grâce.
La mort de ces deux hommes notoirement connus pour leur bonté, vécue en direct va transformer tous les villageois. C’était cela la punition collective dont parlent les généraux Mac Mahon, Maréchal Randon, le général Cavaignac et autres stratèges de la mission civilisatrice du colonialisme.
On entendait pleurer, hurler, crier de toutes parts
Il y’avait présents sur scène les enfants des condamnés. Certains seront marqués à jamais par cette exécution sommaire
Les enfants de moins de 7 ans, empêchés de se rendre sur les lieux se souviendront, eux aussi à leur manière, de ce jour. Empêchés à coup de pieds de s’approcher de l’endroit ou se déroulait le drame, par le lieutenant, ils finiront pas savoir ce que l’on avait voulu leur cacher. Mais juste le temps du forfait, car ils savent maintenant que ce qui s’était produit était ignoble. L’enfant, en entendant les adultes chialer, savaient que quelque chose d’insoutenable se déroulait à leur insu.
MOHAND OUBELKACEM, qui avait juste 17 ans sera marqué toute sa vie. Il venait de perdre définitivement son père Arezki, pour une raison qu’il n’arrivait pas à comprendre. Sa réaction en voyant le sang jaillir du front de son père au moment où la balle est venue traverser sa tête, était inconsciente, il commençait à balbutier quelques phrases qui’il n’a pas pu empêcher de sortir de sa bouche malgré le risque qu’il courrait d’être à son tour fusillé
« Pourquoi ?pourquoi mon Dieu ? Vous avez tué mon père ! »

La réplique ne s’était pas fait attendre de la bouche même du lieutenant très en vue dans ce genre de corvées
S’adressant à Mohand Oubelkacem
« Tu n’es pas content ? Si tu n’es pas content nous te ferons la même chose »
Mohand Oubelkacem « maintenant que mon père a été tué, vous pouvez me tuer moi aussi, je n’ai plus rien à attendre de la vie ! Allez y ! Tuez moi ! » Puis il explose dans un sanglot mêlé de rage et de douleur. Il continuait à pleurer comme un enfant.
Mission accomplie, la section rejoint le camp sous le commandement de Pelardi. La foule s’est disloquée dans un climat de désespoir, j’allais dire de fin du monde.
Ces soldats qui repartent en fin de journée, peut être fières de leur exploit pour certains, comme c’était visiblement le cas de ce harki ; peut être aussi que pour d’autres chagrinés, malgré l’énorme service rendu à la France coloniale.
Pour Pelardi qui pensait que ce châtiment collectif allait précipiter la pacification de la population d’iferhounene, la mission était bien remplie, il pouvait donc prétendre de la part de ses supérieurs immédiats, Favier et Wolf à une décoration
Mais pour ces petites gens, le double crime commis sur des éléments de leur familles allaient dévoiler d’emblée pour leurs petites cervelles de primitif et éveiller leur conscience que les intérêts de ce « djens ou roumi » cette nation française, européenne leur réservait un avenir de plus cruels à eux et à leur progéniture
Les intérêts de la France coloniale venait d’être sauvés de la menace que constituaient ces pauvres types qui avaient osé désobéir à l’éminent missionnaire de l’entreprise humanitaire civilisatrice dans un village de France qui s’appelle iferhounene , situé à 160 km d’Alger et 60 km de Bordj Tizi-Ouzou.
Ignorant peut être qui est l’envahisseur, car me dira t on aussi qu’un soldat c’est fait pour obéir.
La question de ce fait devrait être adressée à sa hiérarchie et non à lui .il vous dira qu’il faut s’adresser à Salan, Massu, Randon et Mac Mahon, Cavaignac, Pélissier qui ont cru en l’Algérie française.
Mais moi autant que de Gaulle au moins, je n’en ai pas cru l’ombre d’une aiguille à cette émancipation, assimilation, en ôtant la vie aux autochtones pour quelque motif que ce soit, car rien ne justifie le crime pas même l’instauration d’une démocratie. En autres termes, une démocratie sans moi, ne peut être envisagée. La suite des événements qui se sont succédé même après l’indépendance de l’Algérie ; va nous révéler si besoin est que les tenants de la théorie « des possessions françaises’ et plus tard de l’Algérie française étaient pleinement et entièrement responsables de la mort de plus de 1 500 000 algériens et de plus 30 000 français auxquels faudrait-il ajouter des milliers d’estropiés et handicapés mentaux.
En somme comme dirait julien Garnier « mais ces jeunes appelés étaient innocents. Jamais ils n’avaient été confrontés au moindre rebelle et leur mort me navrait. D’autant plus que nous n’étions pas certains en fin de compte de pouvoir garder l’Algérie à la France. Assurément, dans cette pénible affaire, le FLN, bien qu’il fut l’ennemi, me parut moins responsable que le gouvernement gaulliste, qui continuait d’alimenter l’armée d’Algérie en jeunes français inexpérimentés, lesquels tombaient alors que la décision d’abandonner l’Algérie était déjà prise. En toute honnêteté, contrairement à ce qui était communiqué officiellement aux parents, je considérais que ces jeunes ne mourraient pas pour la France, mais, pour rien dans cette tragédie »

Écrit par : si hadj mohand | 01/04/2008

MERCI POUR VOTRE MESSAGE
JE VOUS PRIE DANS LA MESURE DU POSSIBLE DE ME COMMUNQIUER VOTRE EMAIL
ABDENOUR SI HADJ MOHAND

Écrit par : si hadj mohand | 02/04/2008

France-Algerie : Des effets négatifs
du colonialisme français

par abdenour si hadj Mohand

sihadj_abdenour@yahoo.fr


Loin de moi toute intention de vouloir développer une polémique , que l’on serait tenté de penser à la lecture de ces lignes , en particulier , en ces moments de fortes interactions économiques, politiques et culturels induites par la mondialisation,Mais si mes propos peuvent en effet par hasard constituer une réplique ou un soutien implicite à quelque titre que ce soit , à des courants qui naissent ça et la ou des positions conjoncturelles d’institutions étatiques quand cela ne risque pas d’être interprété comme une attaque contre le silence , pourtant coupable devant l’histoire, sur ce drame vécu des peuples algériens et français dans cette longue et pénible colonisation de nos ex-députés , ce silence mortel inexplicable sur ces milliers de cimetières alimentés par la machine à semer la mort de ce colonialisme vile d’un siècle et 32 ans , et sur l’initiative malheureuse de la présente assemblée nationale de ce colonialisme et non moins fille héritière de la mère des droits universels de l’homme déjà en 1789 est tout simplement à regretter pour ne pas dire à blâmer si tant est que une organisation représentative peut être jugée , condamnée.

En effet , notre assemblée nationale inexpérimentée n’a pas eu suffisamment d’informations sur l’histoire de notre pays en particulier sur ce qui s’est passé durant le dernier siècle,pour défendre , seulement contre l’oubli, de nos générations futures , cette misère , la torture , la mort , la rénégation de nos ainés- pendant que , de surcroit , comme pour amplifier le mal de l’autre coté de la méditerranée l’on s’évertue à trouver des effets civilisateurs , salvateurs , lénifiants , bienfaisants à ce système violent , inique et génocidaire sans l’ombre d’un epsilon de doute.

Ces conséquences, tout le monde s’accorde à les reconnaître tant en métropole qu’en pays colonisés, toutes couches sociales et toutes philosophies et religions confondues sont désormais identifiées , inventoriées et étalées au grand jour :

1. coté algérien : 1500 000 martyrs et plus de 4 millions d'orphelins
Passons sur ces morts car ils ne souffrent plus malgré que beaucoup d’entre eux sont morts sous la torture ou brûles vifs avec des bidons de napalm ou jetés vivants d’un hélicoptère quand ce n’est pas simplement assassinés cyniquement dont ces soldats et gradés fse ou fsna ont cru pendant toute leur période aux bons et loyaux services envers la France, leur patrie, être un haut fait de guerre. tuer un homme non armé et de surcroît en le laissant croire qu’il est enfin libre et qu’il peut rejoindre ses enfants et son épouse terrorisés ; que le cauchemar est terminé , et trouver le mot pour le qualifier « la corvée de bois » pour lequel j’implore dieu tout puissant de le punir sans aucune clémence ni miséricorde- au risque de blasphémer , que cette sentence , j’ajouterai soit équitable que l’auteur soit musulman , chrétien , bouddhiste , juif ou communiste

Dieu ,entendez ma prière que ceux qui se sont comporté comme des dieux sur terre injustement soient à jamais livrés aux flammes et au froid de l’enfer et de la gehemme ; car cette pratique ne peut apporter à l’humanité que la haine , la mort, et la souffrance

2. cote français :

30 à 40 000 morts pour une cause perdue ou pas de cause du tout
A cela faudrait il ajouter des milliers d’estropies , d’handicapés physiques et mentaux , des orphelins et des épouses veuves que rien ne peut réconforter dans cette métropole retrouvée avec ses classes sociales , ses difficultés matérielles , ses nouvelles visions politiques qui vous laissent ruminer vos pensées sombres de tortionnaires , de paras ou de légionnaires dont seule la mission de votre vie définitivement , est terminée avec la fin de la guerre.
Pour beaucoup de survivants il reste le courage d’écrire malgré qu’ils voient s’estomper avec l’age la force et la mémoire.
Pour certains, moins coriaces des êtres humains sensibles ils n’ont plus le courage de revivre leur vingt ans happés par la folie meurtrière des stratèges convaincus de ce qu’ils appellent la mission civilisatrice mais qu’ils n’ignorent, au fonds d’eux mêmes qu’il s »agit d’une invasion d’un territoire étranger, une spoliation une destruction systématique de ce qu’ils appellent l’ennemi pour les besoins de la cause, une extermination un génocide, Pour s’offrir terres ; air, mer, montagnes, mais aussi des bras pour des travaux pénibles de l’expansionnisme et d’ esclavagisme

3. les harkis :

Le colonialisme exploite jusque à la détresse des peuples et des individus
C’est la faim, la torture, et la peur de la mort qui ont engendré ce phénomène mais plus criminel des castes , ce colonialisme, le crime contre l’humanité et cette attitude d’ingratitude envers ceux qui ont aidé la France coloniale non seulement à se libérer du joug nazi, mais surtout à l’assister dans sa sale besogne d’asservissement d’autres peuples. Et sans vouloir défendre les harkis qui pour moi ont bel et bien défailli envers leurs frères fellaghas,ils ont épargné à ce conquerrant des pertes énormes- ils ont servi la France sans aucune dignité , ils ont torturé et violé , tout cela certainement pour la France ou à cause de la France .je dois dire , car la répression coloniale , le système colonial , violent , criminel ; génocidaire n’a laissé aucune alternative aux colonisés- c’est à cause de la France coloniale et non pour la France coloniale que sont morts des milliers d’algériens et de français. C’est à cause de la France coloniale que sont violées des algériennes et des françaises et non pour la France. C’est aussi à cause de la France coloniale que sont torturés , exécutés de part et d’autre des êtres humains innocents. c’est également à cause de la France coloniale que des êtres humains ont perdu la raison. c’est enfin à cause de la France coloniale que des français ont pris le maquis au cote des algériens que l’on nomme fellaghas et des algériens ont fui la mort dans l’âme , affamés, pour se jeter dans les bras d’une France impérialiste , machiavélique , ingrate. , croyant en la clémence de la mort pour chercher refuge dans cette France qui n’est nullement leur patrie et qui n’en sera jamais, n’en déplaise aux gouvernants et harkis, ne sont jamais français et ne le seront jamais. Ceci étant, par contre ce qui est sur est qu’ils sont abandonnés à mi chemin voila les effets bénéfiques du colonialisme.

4.Economie :

la France coloniale a construit la colonie, développé son économique alors qu’elle n’existait pas
Oui ! En effet grâce à la sueur et au sang des indigènes, grâce aussi aux impôts perçus sur ces minables propriétaires de quelques arbres et de quelques têtes de bétail .Grâce également aux travaux forcés et aux corvées, beaucoup de routes, de bâtiments avaient été édifiés pour le bien être de l’humanité européenne

5.l’Education et l’enseignement :

la France coloniale a construit des écoles françaises et avait segmenté les filières et les niveaux scolaires

6.le commerce extérieur

la France coloniale a permis à l’Algerie d’exporter sa production ; en effet ; pendant que des enfants de fellaghas n’avaient rien à se mettre sous la dent, oui ! Nous n'avions rien à manger- le rapport de Rocard n’était sans doute pas parvenu entre les mains des décideurs français contiendrait il que des affabulations ?
La soldatesque française , sans doute aidée de ses précieux supplétifs qui connaissaient bien les habitudes de vie des leurs ex frères détruisent tout sur leur passage y compris quelques œufs cachés dans le trou du mur, sous prétexte qu’ils pouvaient servir aux fellaghas de repas copieux ignorant dans leur folie meurtrière ,leur inconscience pathologique que même ces enfants , ces bébés avaient un besoin à satisfaire ,celui de survivre- la France coloniale porte la responsabilité historique du crime contre les bébés,les enfants et femmes de fellaghas- un crime raciste qui ne dit pas son nom car livrés à la mort , des années durant où beaucoup d’enfants sont morts de faim, de maladie et de bombardement - je ne citerai pas de noms je garde le secret au jugement dernier
Oui pelardi ! Wolf et Favier, léger, Faure, de Gaulle ; Salan, et autres stratèges de guerre, vous portez la responsabilité du crime contre les enfants algériens.Pas seuelement contre les enfants de harkis que vous avez abandonnés.

Crime contre les enfants des harkis qui aujourd’hui, ne savent plus qui ils sont , d’où ils viennent et où ils se dirigent
Vous portez la responsabilité de centaines peut de milliers d’enfants nés du moment de plaisir de jeunes soldats égarés fse ou fsna.
C’est cela qui interdit à toute institution de faire l’apologie du colonialisme.
C’est cela qui , aussi, oblige les institutions d’un pays libéré à immortaliser dans ses lois, son histoire éternelle.

Auteur des ouvrages
1.fils de fellagha
2.la guerre franco algerienne
3.la guerre veue par un chasseur alpin en kabylie
Aux editions publibook
www.publibook.com
cherchez en tapant le nom de l’auteur : abdenour si hadj

Écrit par : si hadj mohand | 12/04/2008

Iferhounene : une urbanisation qui tarde à venir
Par
Abdenour si hadj mohand


« C’est un village typique de l’habitat rural méditerranéen par sa situation sur un « éperon ». La vie n’y est sans doute pas très différente de celle que l’on pouvait rencontrer un siècle plus tôt sur les bords de tout le bassin méditerranéen. Cependant, c’est à 150 m de ce village que j’ai vécu près de sept mois. C’est là que j’ai découvert la rude vie des montagnards kabyles, où la faim n’est pas loin, et où la société moderne n’a pas modifié les anciens usages et coutumes. En 1961, le village est très peuplé, car il abrite des personnes déplacées » Ce sont là les phrases d’un soldat français, chasseur alpin pour décrire sommairement la vie dans sa simple expression, primitive aux yeux de cette puissante coloniale développée et injuste en même temps pour ce peuple sortie de la légende des siècles.
Ajourd’hui le village ne ressemble plus à ce qu’il était il y a 50 ans. Cela, vous diriez, est tout à fait normal puisque les choses ont depuis, beaucoup évolué. Moi j’ajouterai, si vous le permettez, dans quel sens, en mettant un point d’interrogation, toujours avec votre permission.
En plus de ses habitants propres, il y a de ceux des villages avoisinants qui sont venus s’y installer. Les raisons sont multiples. Nous ne citerons que la recherche d’un emploi qui semble pourtant aussi pénible à trouver que dans les fonds fins des ravins escarpés où se dissimulent depuis la nuit des temps ces villages éparpillés ….Tikilsa , Taourirt , Ait Ali OUAYAHIA ,Mnea , Ait Ouatas , Tifilkout , Zoubga, Soumer ,Tirourda. A cet égard, Iferhounene, géographiquement semble jouer le chef d’orchestre dans cette symphonie de villages.
Les activités socioéconomiques de l’Administration étatique : mairie, daïra, hôpitaux, lycées et dans un passé éloigné, le souk el fellah, la capcs, la sempac,ne pouvaient venir à bout d’une population qui croit vite et qui est livrée à elle même , sont à ce titre trop maigres pour l’occuper et lui assurer la nourriture quotidienne.
Il y a aussi quelques artisans, essentiellement des ferronniers, des menuisiers. Mais le plus gros reste les alimentations générales, les boucheries et les marchands de linge de toutes sortes. Qu’à cela ne tienne, le chômage, dans cette région donne des signes criards, et nous livre cette triste impression de régner en maître absolu. Pour s’en rendre compte, il vous suffit d’observer les déplacements presque au hasard des citoyens de ce douar, autrefois vénéré, LES ATH YETSOURA,, et les longues files de stationnement des fourgons qui nous suggèrent ironiquement qu’ils sont alignés là comme pour inviter l’esprit des jeunes montagnards candidats au mieux à l’exil , au pire au suicide , pour quitter définitivement cet horizon fermé.
La visite du chef du gouvernement dans cette localité enclavée, remonte à une époque lointaine, et le rythme de développement n’a depuis pas changé. Hormis l’artisanat traditionnel, en phase de balbutiement, aucune autre activité n’est à signaler. Au contraire , certaines professions libérales tentées de s’ y accrocher , comme les avocats , les bureaux d’études et d engineering , les dentistes , les entreprises , les librairies , ayant vite compris que le marché n était pas porteur, se sont empressées de fermer boutique. A Iferhounene, l’état a beaucoup à faire, Pour ne pas dire que tout reste à faire, pour lui, tant la région est naturellement loin d’être gâtée par Dame nature. L’agriculture, limitée aux arbres fruitiers, obéit aux caprices de la météo, et est mise à rude épreuve par le décalage des saisons. Nous sommes à plus de 1000 mètres d’altitude, l’hiver s’installe furtivement et la neige guette, pour étouffer de son épais tapis blanc les embryons de fruits qui aident le rustique kabyle à vaincre la faim. Passons sur les énergies dépensées pour se procurer vivres et moyens de chauffage pendant ce temps que dure cette saison glaciale, brumeuse et stressante. Les malades quant à eux, peuvent attendre que le sol se déshabille de son manteau blanc pour permettre aux véhicules à quatre roues de pouvoir enfin reprendre leur piste sans faire du surplace ou du patinage sur glace.
L’hiver passé, le printemps habille le relief de son habit verdoyant, mais cette mine grise va-t-elle enfin quitter ces visages des quinqui genti ? On attend l’été, quand le soleil brûlant vous réchauffe les os pour sortir de cette léthargie, et tenter de l’atteindre en escaladant le pic du zénith. C’est l’inespérée, unique, mémorable, lénifiante occasion qu’offre AZRO N T HOR, le Pic du Zénith, aux jeunes filles pour rêver de leur nuit nuptiale. Quant aux jeunes males, ils continueront à voyager dans leur rêve, aveugles devant la beauté de nos femelles.

Écrit par : si hadj mohand | 21/04/2008

Je viens de voir que mon commentaire est noté sur l'histoire d'un piton? Hors Beaupretre n'est un PITON mais un douar sur la route de Draa el Mizan à Tizi Renif et il faudrait aussi mettre les pendules à l'heure : en fait de pitons, ce n'étaient que des postes installés sur des hauteurs. Je sais de quoi je parle : chef de groupe de liaison, d'observation et d'intervention, j'ai parcouru avec mon groupe de El Afroun à Azazga en passant par Palestro. Je pense qu'il serait temps de dire ce qui est vrai et d'éviter les romans de guerre où le rédacteur est un héros !

Écrit par : Bidaut | 09/05/2008

En complément de mon intervention, je pourrais être un héros : croix de la valeur militaire avec citation à l'ordre du régiment; et alors?
Nous étions là; pas de notre chef et comme je me suis permis de dire à mon capitaine: "Prenez un agneau et mettez-le dans la merde et il devient un loup !"

Écrit par : Bidaut | 09/05/2008

Merci de la publication de mes commentaires ... mais je suis très convaincu de mes idées et serais heureux d'en parler en dehors de toutes idées partisanes.

Écrit par : Bidaut | 09/05/2008

Pas de commentaire? aurai je mis le doigt ou ça fait mal?

Écrit par : bdaut | 28/05/2008

L’indépendance de l’Algérie telle que vécue dans un village Kabyle
Iferhounene 1962
Par

A. Si Hadj

Cette histoire est véridique. Elle s'est passée en Kabylie dans un village perché sur un "éperon". Un village vieux comme le temps où étaient venus depuis avant 1500, les ancêtres s’y réfugier plus que pour s’y installer confortablement. Depuis qu'ils s y'étaient établis, nos ancêtres n'avaient jamais cessé de lutter. D’abord contre la nature impitoyable, le relief escarpé, les saisons rudes tant pour leur chaleur que pour le froid hivernal de cette très haute chaine montagneuse. Et ce n’était pas incidemment que les habitants de cette région très haute, sont appelés, dites vous bien par les autres kabyles, les imesdourar, c'est-à-dire crûment « les montagnards ».porter ce qualificatif de montagnards et de surcroit parmi d'autres montagnards apparaissait aux yeux des autres kabyles des vallées ,comme une prouesse,un defi aux conditions atmosphériques ,géographiques et climatiques.
Dans ce village, il ne restait ou presque en 1962, aucun adulte, à l’exception de ceux qui étaient emprisonnés ou atteints de maladies invalidantes, ou encore, ceux très rares, croupissant sous le poids de l’âge et des chagrins. La guerre plus impitoyable que la nature sauvage en ces endroits impénétrables avait tout emporté. Pères frères, cousins oncles, tous ont été tués, qui dans le maquis, les armes à la main, qui fusillés lâchement après des séances interminables de torture. D'autres encore plus jeunes , ou aux premières dents ..aux vagissements, ont été arrachés cruellement à la vie, par la faim, la maladie ou les conditions sanitaires déplorables de leur évolution physique.
Quelques mois avant l’indépendance de l’Algérie
L’indépendance de l’Algerie , du moins ici en Kabylie ressemblait à cette fille des années 60 .elle n'avait que 10 ans en 1962.d'une beauté que seuls ces kabyles de culture naturelle, primaire j'allais dire, par opposition à celle artificielle de la plupart des occidentaux ; pouvaient apprécier à sa juste valeur. Ce charme discret, je dirais même caché volontairement, mais jamais maquillé. La guerre et sa soldatesque avait fini par imposer ce reflexe, pour protéger l’essentiel, le fondamental le sacré féminin, la survie jusqu’a la nuit de noce et au-delà, de la virginité de ces jeunes filles. Se couvrir la peau du visage de cendres, de charbon, parfois même d'excréments de bébé pour donner d'elles-mêmes à ces soldats français une image répugnante de vieilles sorciéres, dégageant, parfois une odeur pestilentielle. Cet accoutrement bizarre était fait pour amocher la plus belle femme du monde et qui avait dans le passé de l'Algérie coloniale fait dire à un de ses artisans chefs :"mais qu'elles sont moches ces algériennes. Regarde, elles sont comme de véritables singes!"
Pourtant des reines de la beauté se cachent sous ce fard diabolique fait pour enlaidir.Cette fille, qui n'avait pas eu sa séance d’esthétique, car trop petite encore s'est révélée subitement à la vie avec toute sa splendeur. Elle s’appelait Zahra. Petite taille mais bien corpulente. Elle avait, cette marque rare qui pouvait la distinguer des autres filles et femmes : des taches de rousseur sur un visage rond .Un nez fin surmonté de deux yeux noisettes exprimant déjà à son âge un vif sentiment maternel ,cependant que son teint blond légèrement rosé, insinuait à son regard une expression d’un enfant innocent . Elle fréquentait l’école du village, des baraques de l’ex SAS, héritée du colonialisme français. Déjà dés les premières classes de cette école coloniale, pour ses mérites, la première place lui revenait comme de droit. Ce qui allait forger en elle ce mythe de supériorité, reconnu par l’opinion générale, et surtout par la société archaïque ; traditionnelle dans laquelle évoluait péniblement la science occidentale de l’éducation et de l’enseignement. Elle avait donc tout, pour envouter son entourage, de façon pacifique et sans résistance aucune. L’unanimité allait se faire autour d’elle tant pour son élégance que pour son ouverture d’esprit. La beauté, le charme, et l’intelligence. Un modèle de réussite pour une femme kabyle dans une société kabyle de l’après indépendance. Pour ce qui est par contre de l’homme, il n’est presque rien demandé de lui. La beauté pour le sexe masculin résiderait dans le travail, et l’obéissance aux parents. Pour ce qui est de l’avenir de cette fille qui attire, si jeune, le regard de tous, comme on le disait jadis, chez nous dans ces villages, le temps fera le reste. Son père aura l’embarras du choix pour choisir son futur gendre, car quoique l’on puisse dire, la fille en Kabylie n’a aucun droit à la parole. le paradoxe est que cette pratique est toujours de rigueur en l’an 2008 , puisque , que l’on me raconta tout récemment qu’une fille procureur de la République de son état , a été récemment marié par son propre frère plus jeune qu’elle, sans qu’elle ait à rechigner….
En Kabylie des années 60 ; l’Homme avec un H majuscule s’il vous plait, ne se mesure pas à son âge. A défaut de décider tout seul, l’enfant dont la sœur candidate au mariage, est plus âgée que lui, sera consulté, et peut même parviendra à opposer son véto. En fait c’est là qu’est tout le secret de la puissance du sexe masculin dans notre société traditionnelle.
Revenons à notre héroïne qui vient à peiner de se dévoiler à la conscience générale de ce microcosme très réduit. Pourtant déjà en 1854 la Velléda Fatma NSoumer, réunissait en elle des atouts autrement plus prestigieux qu’universels. , mais il est vrai en plus grand, et dans un domaine où bien des hommes de grandes qualités ont échoué lamentablement. Mais là c’est une autre histoire. Zahra , cette beauté du Djurdjura me paraissait unique dans mon esprit surtout dans un monde où seul le matériel et la force et la résistance comptent ,pour nous renseigner si besoin est sur le cerveau de cette future « éleveuse d’enfants »,qui , paradoxalement contraste avec son physique de jeunes fille destinée à etre mariée, choisie, triée pour reproduire une progéniture enviable selon une tradition orale qui veut que la femme est faite pour procréer , procréer , procréer.
C’était là, paradoxalement aussi, avant que cette SAS ne soit transformée en salles de cours, durant les derniers mois de la guerre que des jeunes femmes, qui servaient la logistique des "fellaghas" ont été lâchement , sauvagement malmenés, torturées. Un certain goummi, du nom de bouhraoua, s'en était donné à cœur joie, en mâtant ces jeunes femmes, d'une beauté très rare, avec ses rangers d’homme sorti de la brousse. C’était là le contraste qui s’était présenté à mon esprit ce jour .D’un coté la beauté et la fragilité de ces femmes jeunes que je ne connaissais ni d’Eve ni d’Adam, et de l’autre ce visage difforme, joufflu, cette masse de chair incontrolée, ce regard d’inculte, sauvage de ce harki qui contrastent de façon ostentatoire. D’un coté la sensibilité, la compassion de ces femmes martyrisées, de l’autre cette brute qui se meut plus pas ses instincts bestiaux, végétatifs que par les mécanismes de son cerveau si tant est qu’il en avait un d’un etre humain. C’était la guerre, et juste avant le cessez le feu. Ces femmes courageuses, on les appelait en kabyles " thimnouchines. "Allez savoir ce que cela pouvait signifier ce mot parmi ces nombreuses pseudos et surnoms de cette guerre injustes : harkis, imnouchens, goumiers, fse, fsna. fellaghas, felouz, fels , ce vocabulaire était riche, à l'image des drames ,des supplices, des morts ,des torturés.
1962 : l’indépendance de l’Algérie, telle que vécue à Iferhounéne, un village de la haute Kabylie.
Finie la guerre. Mais, la souffrance n'allait pas pour autant abandonner cette contrée. Certes, ce n'était encore, dans cette « société primitive »l’époque des souffrances des grandes amours. Cette douce souffrance qui vous rend la vie tantôt agréable tantôt invivable, mais vous assure équilibre et vous comble d'espoir en l'avenir. Cette souffrance qui ne finit pas dans la corvée de bois ou dans le peloton d’exécution du Lieutenant Pelardi.
Ces chagrins d’amour allaient aussi, venir inévitablement. Pourquoi pas? Après tout on venait de naitre avec l’indépendance, et tout s’apprend dans ce monde en pleine évolution. Regardez ! Hier seulement nous étions sous la botte des chasseurs alpins et leurs supplétifs .Nous voilà libres comme par enchantement.
Mais la société archaïque qui venait de sortir d'une longue nuit coloniale, devait apprendre à aimer, à se tenir à table, pour ceux qui pouvaient avoir une table. S’habiller, se nourrir correctement, pour avoir sa dose de vitamines et d’oligo éléments. Hélas, je dois à la vérité de dire pour ce qui me concernait personnellement, malgré mon jeune âge, j’en avais été gavé, de ces images insoutenables et de ces cris désespérés des suppliciés du camp d’Iferhounéne. Plus tard, pourtant, un ami chasseur alpin, dont j'avais fait connaissance en 2007, me dira "Mohand , Iferhounéne n'a jamais été un centre de torture. Ne croyez pas tout que l'on vous dit». Même si ma mémoire pouvait défaillir, Les victimes survivantes, s’en souviendront encore aujourd'hui, jusqu’à leur dernier soupir, lui ai-je répondu mais sans aucune esprit revanchard.
Les harkis et l’indépendance de l’Algerie
Comme pour clore cet épisode macabre, par le sang et la souffrance, les harkis avaient été rassemblés, ramenés d’abord par camion à bennes, puis déchargés devant une foule en furie, au grand virage d’Iferhounéne ,où tous ,même enfants et vieillards attendaient ce moment fatidique : s’extasier sur l’ultime peine que Dieu avait réservée, par la vindicte populaire , à ces traitres de la nation. C’était le moment de se remettre en mémoire cette phrase lapidaire d'un harki, pas comme les autres, Mohand O. celui qu'on disait n'avoir pas fait du mal à une mouche depuis son ralliement au camp "A SI MOHAND OUALI, la main de Dieu nous rattrapera et nous punira de nos méfaits!"
Ce n’était pas la torture cette fois, à laquelle nous devions assister, car cela n’allait servir à rien. La torture était pratiquée par les colonialistes français, comme avait tenté de l'expliquer sans sourcilier le Général Massu, pour soutirer des informations. La justification de cette pratique a trouvé encore d’autres intellectuels français, non moins acteurs principaux des tristement célèbres groupes de l’OAS, pour s'étaler davantage sur les bienfaits de ces supplices. La douce France, la mère patrie exigeait que l'on martyrisât ces indigènes désarmés, incultes, sales, qui devaient au mieux être asservis au pire voués à la corvée de bois. Tous ces mutilés, tous ces affamés, tous ses corps lézardés, carbonisés, noircis ,décharnés par le napalm, un sacrifice pour la France civilisée nous dira t on, en attendant chacun son tour pour etre sacrifié pour une cause pourtant injuste et perdue d'avance.
on ne trouvera pas d’ailleurs meilleur développement théorique sur la nécessité de faire souffrir l’ennemi »pour obtenir des renseignements , que le livre de Garnier intitulé « en Algérie avec les Harkis »,occultant volontairement le fait capital :l’invasion illégal , d’un territoire appartenant à son peuple légitime. Or, dans le cas des harkis, pour le FLN et tout le peuple algérien en fait qui lui était totalement acquis sur cette question, l'information était notoirement connue de tous. Ils sont les traitres de la nation, les exécuteurs de nos parents, les violeurs de nos sœurs, de nos mères, les éventreurs de femmes enceintes. De ce point de vue, donc personne n’attendait rien de ces harkis, comme explication, ou renseignements. La question dés lors ne posait pas et devenait même saugrenue.
Un nouvel avenir pour les algériens
Fini, aussi la dernière image de ce « théâtre » lm macabre auquel j’a assisté en direct : Après cette vague d’exécutions post indépendance, les harkis étaient, soit tués, soient chassés en France, malgré l’interdiction faite par les hauts responsables français de les rapatrier, soit libérés mais non sans les avoir souvent handicapés à vie. certains d’entre eux croyaient que tout allait rentrer dans l'ordre comme cet « écervelé »de M .T qui pensait se racheter , en venant , tendre sa main à mon grand père El Hadj Ali , comme si de rien n’était , s'dressant à lui " Bonjour SIL HADJ ALI" réponse franche et spontanée de mon grand ,aussi sèche qu’amère : « retire ta main de là , elle est sale et quitte toi de mes yeux".
En fait la main de ce harki notoirement connu, était selon le langage kabyle souillée du sang de martyrs, de sueurs de suppliciés torturés à mort.
Finie enfin la guerre d’Algérie, il ne restera que les traumatismes ineffaçables. La question des harkis et des pieds noirs sera abandonnée aux exigences de l’heure et à la vitesse du temps. Entre la France et l’Algérie il y a bien plus que la destinée de ces êtres étranges, marginalisés des deux cotés de la bataille. Ils ont attendu et continueront d’attendre sans aucun doute. je crains qu’ils ne puissent encore attendre longtemps, peut etre même passeront ils le flambeau à leurs enfants et arrières petits enfants que la question ne sera jamais réglée. En fait , de quelle question s’agit il et quel problème reste à régler dans une affaire d’occupation illégale et illicite d’un territoire étranger ? Il y a bien trop d’intérêts commerciaux qui lient le Métropole à son ancienne colonie.il ya bien trop de préoccupation partisanes d’un coté comme de l’autre pour s’atteler à régler des problèmes sentimentaux, l’économie utilitariste nous y contraint en ce siècle d’enjeux matériels.
Quelle place pour l’amour pour le colonialisme« civilisateur » ?
Dans ce village que j’ai décrit, le temps est maintenant au balbutiement de l’amour. La guerre n'a pas épargné ce village pourtant très éloigné de la France, pour l'avoir qualifié de village de France déjà en 1959.Ses habitants seraient aujourd’hui des étrangers à ce village ou bien simplement des citoyens français à part entière. En effet comment puissions nous etre villageois kabyles, dans un village de France sous occupation et ne pas revendiquer cette appartenance à cette nation civilisée aujourd’hui que le lien qui préside entre les deux peuples n’est plus l’affrontement, mais la coopération, le travail, le logement, l’émigration : quelle ingrate que cette France, en temps de paix, qui rejette les revendications sociales de ceux qui l’ont servi dans les moments difficiles au prix de leur vie. Mais passons sur cette digression, mais sans avoir mentionné, que pour ce qui me concerne, je ne revendique rien, sinon que la France reconnaisse ses crimes.

L’amour ne va pas passer inaperçu dans ce village, comme il en existait il y a peut etre plus d'un siècle dans le sud de la méditerranée.
Une histoire d’amour, commença à naitre, va- t-elle survivre, non plus aux obus, au crépitement des armes, à ce feu croisé auquel nous étions soumis tous les soirs, entre troupes du colonel Amirouche et chasseurs alpins des command Wolf et Favier, de la terrifiante section égrenée de harkis commandée par le lieutenant Pelardi, un natif de L’ALSACE. un nazi et non moins français de nationalité, de langue et de conviction. C’est ici , à Iferhounéne que les faits contredisent le général Massu qui se plaisait à mentir à un journaliste qui l’interviewait « qu’il n’avait jamais assisté personnellement à des séances de torture , qu’il s’était lui même appliquée la gégène mais en prenant soin de ne pas faire tourner la manivelle à grande vitesse, et que de surcroit que la situation qui prévalait en Algérie était loin de ce qui vivaient les Viets ou les juifs victimes de l’holocauste » quelle cynisme ! et quel trouble du raisonnement ! En fait comment peut juger clémente une torture sans en etre ni l’auteur ni le spectateur ?Il faut etre une ‘Massu pour réussir cette prouesse…effrontée et éhontée ?
l’Algérie ressemble à bien des égards à cette charmante fille qu’on imagine mais que l’on épousera jamais , car le destin en a décidé autrement ?
L’amour, nous le verrons, peut attendre encore longtemps pour s'installer à Iferhounene., comme pour nous dire que la paix n'était toujours pas la condition suffisante pour y venir bivouaquer. les traditions , quelles traditions, les caractères , les préjugés , vont mener la vie dure à cet amour naissant , en Kabylie, à tel point que l'amour était devenue un ennemi à abattre , ignorant que cela équivaudrait à abattre , dans cette histoire d'union sacrée, son propre fils , sa propre fille , son cousin ou son neveu qui par malheur venait à demander sa part de cette vie douce , libre et joyeuse. Cette indépendance chèrement acquise doit etre gouttée par tous.
. Quand un kabyle jure" qu’il ne donnera jamais sa fille à ce fils de veuve, entendez par là que même s'il devait enterrer vivante sa fille, c’est aussi l'amour à qui l'on fait subir le même sort que ces harkis. On le torture, puis on l'exécute. Il faut dire que l'amour dans ce petit village en 1962 pouvait encore attendre des générations pour s'y installer.
Iferhounéne demeurera t- il toujours ce village traditionnel ? Pourra t il un jour, dans dix ans ou vingt ans, il faut prononcer vinguéte, comme dirait mon cousin Tayeb, accéder au rang de ville moderne ? Ce jour là ,peut etre, nous ne serions plus là, pour écrire encore quelques lignes sur sa beauté
Poème épique

Iferhounene : Destruction de la demeure des ATH L’IMAM
en 1959 Par l’armée d’occupation



AKLIYI DHAG FARHOUNENE
OUDHMIOU INOU AMELMEGGUETH

NATS HOUDDOU ELHARA AITH LIMAM (1)
ANEF IOUROUMI ADHISSAROUETH

CHEF ENNAGH DH AMEZIANE (2)
YAHTSVAHHITH YIOUETHYEOUETH

AHAKANE AYAMEZIANE
AFOUS ARRABI AKITTEF


Je suis à IFERHOUNENE
Avec ma mine cadavérique

Contraints (par le France) de détruire la demeure des aith l’imam (1)
Car soumis aux folies du ROUMI (3)

Notre chef, était AMEZIANE
Qui nous interrogeait une par une (4)
Tu ne perds rien pour attendre, AMEZIANE !
La main de Dieu finira par t’attraper pour te punir

Extrait de : « le fils de fellagha »


Précisions :

1. Les graffitis du FLN sont de BELKADI Ali « Pas de vote, l’Algérie aux algériens »
2. Réponse de la propagande coloniale « Vive la France, Iferounene (iferhounéne) village de France

Notes :

1. Aith Liman –littéralement : ceux de l’imam, c'est-à-dire la famille de l’imam, traduit d’enseignants de Coran . Cette famille a pris pour nom par la suite Si Hadj Mohand , par rapport a son aïeul qui a obtenu son titre de pèlerin – hadj
2. Ameziane Ath Oul’aali. : Supplétif dans l’armée française originaire de la région
3. AROUMI, équivalent de romain mais s’applique aux européens. Ici c’est la France qui est visée
4. interroger au sens de passer un interrogatoire musclé. Il s’agit ici de femmes qui étaient contraintes à ce genre de travaux

Écrit par : si hadj | 15/08/2008

BONJOUR
JE VOUS SAURAIS GRE DE BIEN VOULOIR M'INDIQUER LES COORDONNES EXACTES EN VUE D'UN CONTACT DIRECT DE

http://sitelimafox.free.fr/AFN/PageWeb.htm

Écrit par : si hadj mohand | 18/08/2008

je vous prie de me mettre en relation avec FRANCOIS LAMOUR DU SITE BARAKA
MERCI

ABDENOUR,
auteur de Fils de fellagha :
la guerre vécue par un chasseur alpin
aux éditions publibook

Écrit par : si hadj mohand | 08/09/2008

Franchement, j'aime bien vos pages web !
merci

Écrit par : dj | 10/10/2008

slt merci bien pour cette article qui est intéressant pour nous l'association tamussni qui aime bien connaitre notre histoire en tant que nous sommes des gens de (haussanvillers) naciria maintenant et merciiiiiiiiiiiiii

Écrit par : nacer | 08/08/2010

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