23/01/2021
Les Beni-Douala le 7 octobre 1856 (Alphonse BERTHERAND)
Les Beni-Douala (Les "Beni-Douela" dans le texte)
Campagnes de Kabylie (Pages 182 à 184)
Alphonse Bertherand · 1862
(Division Renault) le 7 octobre 1856 :
Après deux heures consacrées au repos et au déjeuner, les troupes complètement ralliées, se remettent en marche à midi et s'élèvent insensiblement, par les contours interminables qui enlacent des mamelons successifs jusqu'à l'Arba des Beni-Douela. II est trois heures quand les premiers arrivés mettent sac à terre. Aucune cartouche n'a été brûlée de toute la journée. Mais, des pilons qui dominent le bivouac, il est aisé de reconnaître qu'une grande agitation règne dans la contrée où une marche rapide et inopinée vient de nous jeter, au milieu d'ennemis avec lesquels nous avons quelques revendications à régler. Des Kabyles armés courent inquiets d'un village à l'autre, tandis que les vieillards, les femmes et les enfants se sauvent à la hâte, en désordre, emportant au loin hardes et provisions ; des groupes d'hommes valides - du sein desquels s'échappent des cris, des vociférations et parfois des injures en langue française - semblent se concerter pour la défense ou l'agression. Les Beni-Douela passent pour compter parmi eux bon nombre d'anciens tirailleurs indigènes libérés ou fugitifs, et prétend-on aussi, plusieurs déserteurs français.
Les troupes massées et le camp assis, la colonne est bien tôt rejointe par la brigade du colonel Pellé, sortie le matin de Tizi-Ouzou. L'eau peu abondante est assez éloignée du camp, disposition qui n'échappe pas à l’attention de l'ennemi.
Dès sept heures du soir, les Beni-Douela, renforcés de quelques contingents des Raten, commencent leur feu sur les grand-gardes et le continuent jusqu'à minuit. Enhardis par le silence prescrit à nos vedettes, ils s'avancent jusqu'aux avant-postes, tuent 3 hommes et en blessent 5 : 2 du 75e régiment de ligne, 1 du 60e et 2 du 2e de Zouaves. Un retour offensif les rejette aussitôt dans les ravins où ils ont, à leur tour, 6 hommes tués et plusieurs blessés.
La conduite des Beni-Douela méritait une leçon sévère. Le 7 au matin, une colonne de cinq bataillons allégés de leurs sacs, commandée par le général De Ligny fut lancée contre le village de Taddert-Ouffella autour duquel s'étaient concentrés les rebelles. Ses abords obstrués par d'immenses abattis d'arbres, défendus au loin par des groupes bien fournis de tirailleurs, tout fesait croire à une résistance énergique. Mais ébranlés bientôt par les salves de notre artillerie de montagne, décontenancés surtout par un mouvement de quelques compagnies dirigées sur la droite pour tourner la défense, les Kabyles lâchent pied sans nous disputer davantage leurs maisons et leurs barricades. Maîtres de Taddert-Ouffella nos soldats poursuivent les fuyards avec vigueur, les chassent successivement de trois autres villages et les tiennent en respect pendant le temps nécessaire à d'autres troupes accourues du camp achever l'œuvre de châtiment.
Quand la destruction parut assez avancée, de nature à produire sur le pays une douloureuse mais salutaire impression, la retraite commença, offrant comme toujours, à un ennemi audacieux et irrité, le facile mais éphémère avantage du terrain, pour inquiéter notre arrière-garde. Efforts impuissants !
À deux heures, tout le monde rentrait à l'Arba.
Histoire médico-chirurgicale
des expéditions de 1854, 1856 et 1857.
Alphone BERTHERAND
Éditeur : Paris (France) : Baillière
Année de publication : 1862
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