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25/04/2010

Les jardins d’école (Eliaou Gaston GUEDJ)

 

Comment faire évoluer une société paysanne indigène sans aucune culture professionnelle vers une agriculture aux techniques modernes dans un monde qui se désintéresse totalement de cette activité ?

 

Le décret du 18 octobre 1892 qui précise et réglemente diverses questions de procédures énonce dans ses articles 20, 25, 27 et 28 les procédures à observer pour les créations d'écoles et dans son article 26 les conditions d'installations.

 

Cet article précise l'obligation qui est faite au promoteur d'une école d'enseignement indigène hors des villes de dégager un terrain attenant à l'école afin d'en faire un jardin d'école.

 

Il appartient dès lors à l'instituteur d'aménager avec les moyens du bord le terrain jouxtant l'école et d'y enseigner les premiers rudiments du jardinage à ses élèves. La préparation dans les sections spéciales des écoles normales de la Bouzaréa et de Constantine dans ce domaine se révèle efficace.

 

Le jardin d'école devient dès lors le centre de préparation d'une agriculture sérieuse aux environs immédiats de l'école.

 

Les colons qui utilisent déjà des méthodes importées d'Europe, soucieux de voir se développer une culture qu'ils ont eu tant de peine à implanter apportent sans hésiter leur concours à l'instituteur dans cette tâche pour laquelle il n'est pas préparé. L'intérêt des colons lors de leurs interventions est double. Tout d'abord le développement de leurs productions nécessitent une main d'œuvre qualifiée. De plus ils sentent l'indispensable nécessité de combler le fossé entre une agriculture coloniale en pleine expansion et une agriculture locale qui perpétue un mode de culture périmé.

 

Lorsque le jardin d'école est suffisamment important les enfants s'exercent à la culture maraîchère et arboricole. Les élèves qui sortent de l'école à treize ou quatorze ans savent planter, tailler, greffer les arbres fruitiers.

 

De retour dans leur milieu familial ils s'intéressent alors aux travaux qu'ils ont pratiqués au cours de leur scolarité. Ils sont alors à même de mieux tirer parti de leur jardin ou de leur terre, et sont aptes à devenir de bons ouvriers. Ils deviennent même de bons exploitants agricoles lorsqu'ils sont propriétaires de leurs terres.

 

Si l'action de l'instituteur dans sa classe se révèle prépondérante pour l'avenir agricole de l'Algérie, son action ne se limitera pas à ses élèves. Elle va s'étendre à toute la population indigène du milieu dans lequel il vit.

 

Le jardin d'école devient vite un modèle pour les fellahs qui viennent voir et essaient d'imiter leurs enfants. Par leurs enfants ils reçoivent des graines, des plants de légumes, des plants d'arbres. Ils en achètent même sur les indications de l'instituteur.

 

C'est grâce à cette action des instituteurs qu'ont été plantés dans la région de Fort-National les nombreux cerisiers qui embellissent et enrichissent les jardins de Kabylie.

 

La section spéciale créée à l'école normale de la Bouzaréa, chargée de préparer à leurs tâches particulières d'enseignement et d'éducation les indigènes d'Algérie accueille depuis 1891 des élèves-maîtres sortis des écoles normales de métropole ainsi que des instituteurs en exercice dans les départements français. Ils sont préparés à cette tâche particulière du développement des jardins d'école.

 

Si les instituteurs de la première heure ont été des pionniers, les nouveaux arrivants sortis de la Bouzaréa suivent leurs traces.

 

Si l'action de l'instituteur dans sa classe a été prépondérante pour le développement agricole des propriétés indigènes, son action ne va pas se limiter à ses seuls élèves. Elle va s'étendre à toute la population indigène vivant aux alentours de l'école.

 

GUEDJ-Eliaou-Gaston_L'Enseignement indigène en Algérie.jpgEliaou Gaston GUEDJ

L’enseignement indigène en Algérie

au cours de la colonisation

1832-1962

 

 

Éditions des Écrivains

Paris

2000

 

Pages 99-101

 

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