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06/06/2011

Description de TAGUEMOUNT-AZOUZ (Charles GÉNIAUX) 1

 

Un soir de juin à Taguemmount-Azouz (Taguemount-Azouz) : Vers l'occident c'est comme une liqueur d'or aperçue à travers un flacon de cristal. Sur la place du bourg, les Kabyles sont allongés comme des Antiques sur les terre-pleins dallés couverts de toitures qui forment les djemaa (1). Les visages, les lainages sont comme safranés par les réflexions du crépuscule  limpide.

 

Dans les ruelles qui sinuent au gré des construc­tions, les villageois ramassés dans leurs burnous sont accroupis, le menton aux genoux. Les uns à côté des autres, ils forment des chapelets dont chaque homme serait un grain. Pas un geste, pas un mot et visages inertes chez ces gens. Ils végètent dans leur repos comme ils ont végété dans leur lente action de ce jour.

 

  À la sortie de Taguemmount-Azouz sur le chemin pâle qui descend de la montagne, des petites caravanes de femmes, d'enfants, de chèvres et de moutons s'avancent et toutes ces jambes déliées, lui semblent à peine toucher le sol, soulèvent quelques flocons de poussière argentée. Les garçonnets sautent comme les cabris et les filles en tuniques cerise ou jaune canari semblent des fleurs. À l'horizon, l'éternel Djurjura, ce dominateur du paysage kabyle, apparaît presque diaphane. Enve­loppé par les couleurs du couchant, le Djurjura apparaît recouvert d'une housse somptueuse tissée d'argent, d'or, de pourpre, de verdure.

Taguemount-Azouz_Ancienne-Mosquée_Dessin-Henri-Genevois.jpg

 Du minaret j'entends bavarder dans les djemaa et je vois maintenant descendre par les venelles des villageois qui se sont coiffés du turban afin de faire honneur à l'assemblée.


 

 

  J'arrive à l'une des djemaa, - car chaque « çof » (2) possède la sienne, - au moment où de la galerie du minaret, le mueddin (muezzin), d'une voix che­vrotante que bien peu de Kabyles veulent entendre, annonce la prière du soir. Cependant, à cet appel, trois vieillards vont toucher un galet noir encastré dans le mur de la djemaa. Après avoir maintenu leurs mains sur cette pierre symbolique, ils les étreignent et font le geste de les laver ; puis ils prient, le front au sol. Prière hâtive ! Trois fois ils se prosternent comme s'ils étaient mus par des ressorts. Ils n'ont pas la solennité de l’Arabe en face d'Allah. Ces vieux Kabyles entendent parler autour d'eux et sont pressés de se mêler à la discussion.

 

 

À suivre

 

(1)     Djemaa. la mairie kabyle avant 1871 ; aujourd'hui les droits politiques ayant été retirés à ces montagnards  à la suite de l'insurrection, ]a djemaa n'est qu'un lieu de réunion

(2)   Çof, parti de mutualité offensive et défensive. Le village le plus chétif est partagé en deux on trois çofs qui se détestent. .

 

Charles GÉNIAUX 

 

"Sous les figuiers de Kabylie" 

(1914-1917)

 

Ernest Flammarion, Éditeur

Paris, 1917

 

Commentaires

a tous les citoyens de mon village natal de taguemount azouz , percher sur une crete dominant les montagnes du djurdjura

Écrit par : abdelli | 07/05/2014

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