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24/06/2010

Harkis, Crime d’État (Boussad AZNI)


Histoires écrites avec du sang

« Pour avoir cru en nous, écrit Franz-Olivier Giesbert, des dizaines de milliers de harkis furent égorgés, dépecés ou bouillis vivants par les vainqueurs du FLN. Mais nous n'avons pas entendu leurs cris, ni les protestations des survivants. Depuis le temps, ils n'ont pas troublé notre digestion, ni notre bonne conscience. Nous avons tout de suite été guéris, puisque nous n'avions pas été blessés. La repentance est dans l'air du temps. Mais elle a aussi ses oubliés.»

Le Figaro, 27 mai 2000.

 

Quarante ans après, les cris enfin parviennent jusqu’aux oreilles des Français. Les témoignages patiemment rassemblés, les fragments recollés de notre mémoire en lambeaux, remontent à la surface de la (mauvaise) conscience.

 

« J'ai soixante et un ans, nous raconte Maloud F***. Je suis entré comme harki dans l'armée française en 1958. J'étais d'abord commando de chasse, puis harki dans le 1er Bataillon 2e Régiment d'infanterie de marine, dans la région d'Akbo, en Kabylie, jusqu'en 1962.

 

SUDRY-Yves_Guerre d'Algérie_Les prisonniers des djounoud_p117.jpg

 

 « Le 19 mars 1962, au cessez-le-feu, on nous a reversés dans la force locale. Puis une nuit, les soldats, les soldats français, nos frères d'armes, nous ont désarmés. Ils ont tout pris, fusils, grenades, mitraillettes, et ils nous ont renvoyés chez nous.

« Je suis rentré dans mon village, certain qu'il n'y aurait pas de problème : nos gradés nous l'avaient assuré, nous ne risquions absolument rien, puisque l'armée française allait rester sur place pendant cinq ans, qu'il y aurait des soldats français à Akbo durant toute cette période, qui nous protégeraient s'il y avait un problème. " Et puis les accords signés à Évian garantissent votre sécurité ", nous ont-ils dit. Et dans les grandes villes, l'année resterait quinze ans.

« Pendant un mois et demi, il ne s'est rien passé. Et puis le 18 juillet 1962, j'ai été arrêté par le FLN, avec d'autres. On nous a amenés à Akbo, et là, nous avons été torturés, les uns après les autres.

« Ils ont fini par me jeter dans une cave. Il y avait là des hommes couchés, avec du sang partout. Ils ont recommencé à me battre : j'ai tenté de me protéger la tête, alors ils m'ont brisé les mains. Avec un couteau, ils m'ont entaillé le ventre. Puis ils nous ont emmenés dans un autre village, Lazibe ; j'y ai retrouvé mon copain Badji, arrêté lui aussi, avec son père, et puis d'autres amis encore, d'autres frères d'armes. On nous a tous entassés dans une cave de quatre mètres carrés, sans lumière, sans toilettes, rien que de la poussière. On est restés là quarante-huit heures sans manger. Ils nous ont juste donné un peu d'eau. Et ça sentait terriblement mauvais.

« Ils nous ont gardés prisonniers près de vingt jours dans cette cave, avant de nous transférer dans un autre village, les Acourne. Ils nous ont collés – nous étions une centaine – dans un souterrain, pieds nus, et ils avaient mis plein de tessons de bouteilles par terre, dans la poussière et la boue. On s'est tous entaillé les pieds, alors on a fini par marcher à quatre pattes, parce qu'on n'arrivait plus à se tenir debout.

« Puis ils nous ont déménagés à nouveau, au camp du Maréchal.

« Là, c'était un vrai camp de concentration. On était torturés du matin au soir. Ils nous battaient avec des fils de fer électriques, des marteaux, des barres à mine. J'ai vu de mes propres yeux des gens enterrés jusqu'au cou, vivants, et décapités à coups de pelle. Et d'autres, enterrés vivants, complètement enterrés. Voilà ce que c'était, le camp du Maréchal.

« Puis on nous a transférés à la Maison Carrée, à Alger. C'était beaucoup plus calme. Nous avons fini par recevoir la visite de délégués de la Croix-Rouge, qui nous ont examinés et recensés. Le jour de leur visite, ils sont repartis avec trois cents personnes. Les autres, dont j'étais, ont été affectés au déminage.

« C'est comme ça que j'ai pu m'évader, le 25 ou le 27 juin 1967. Ça faisait deux ans que j'étais trimballé d'un camp à un autre.

« On était quatre. On s'est rendus à l'ambassade de France à Heydra, et on nous a rapatriés en France. J'ai d'abord séjourné au château de Lascours, puis j'ai été envoyé dans un hameau forestier dans le Tarn – la Forêt noire --. C'est là que le chef de camp s'est occupé de me faire obtenir la nationalité française... »

 

AZNI-Boussad_Harkis-crime-d'Etat.jpgBoussad AZNI

Harkis, Crime d’État

Généalogie d'un abandon

 

Éditions Ramsay

2001

 

Commentaires

bonsoir , je suis fille de harkis, j'ai toutes les preuves. mon père à été assassiné et jeté au fond d'un puit.j'ai écris partout, on me répète qu'il faut un justificatif comme quoi il est mort asassiné. vous savez ça l'a été tabou et ça le reste encore. j'ai n'ai jamais pu appeler "papa", on m'a toujours applé "fille de chien". s'il vous plais que dois je faire conseillez moi.

Écrit par : djohra | 28/04/2012

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