Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

11/03/2008

Algérie ! Algérie ! (Éric MICHEL)

"La Kabylie est une région sauvage au relief extrêmement varié soulignant une vaste étendue du littoral algérien. Ici, ce sont des plateaux arides et secs où pousse une végétation basse, quasi steppique, puis des plis de vallons ponctués de touffes de palmiers nains, d'oliviers, de figuiers ou de forêts de cèdres et de chênes-lièges. Là, ce sont de vertigineuses parois tombant à pic dans les talwegs, alimentés par d'aléatoires cascatelles. 

Partout, les accès sont difficiles.

Les sautes d'humeur du terrain rendent ardu l'établissement de voies de communication. Ils ne sont pas rares, les villages qui vivent isolés du reste du monde : c'est la norme. Austères, rudimentaires, jetés pêle-mêle au hasard des caprices de la nature et fondus en elle, ils s'accrochent bec et ongles à des pitons rocheux. Massés sur des crêtes à la dentelle platinée, cloués vaille que vaille à des encoches anguleuses et rouillées, ces fortins épousent néanmoins harmonieusement les coteaux, défiant les lois de l'équilibre.

 

Sur cette terre tourmentée se prêtant naturellement à la rébellion, les Kabyles, montagnards sédentaires, se sont montrés au fil du temps réfractaires à l'ordre établi ainsi qu'à toute domination. Ici, on ne se met pas du côté du manche, et c'est dans les replis d'un pays accueillant aux «bandits d'honneur» que, sept années avant le début du conflit, le premier maquis fut constitué avec une poignée d'hommes sans argent, sans nourriture et sans peuple. On y tenait tête, déjà, à l'administration coloniale avec une seule devise : la dignité n'a pas de prix. Pour arme, une volonté en forme de rêve. Indépendants, orageux, ces hommes forment une société simple, reposant sur d'ancestrales coutumes. Elle ne s'est pourtant jamais constituée en classe. Chez eux, pas de militaires mais des résistants, pas de noblesse mais des hommes fiers, pas de religieux mais une conscience politique aiguisée. En un mot, pas de caste.

 

Portés par le destin, quelques centaines d'hommes joignirent leurs forces. Us se préparaient au grand combat dans l'Est algérien, en Kabylie, dans les Aurès et l'Algérois, alors que l'attention de l'administration française était détournée par le séisme qui avait durement frappé Orléansville pendant l'été.

 

Le 1er novembre 1954, une insurrection populaire éclata simultanément en plusieurs points de l'Algérie. Au pire, on n'avait rien vu venir côté caïds et notables locaux. Au mieux, «on sentait quelque chose» en métropole et, au total, on croyait planer sur le problème comme à Sétif neuf ans plus tôt. Mais la mèche, allumée par les répressions sanglantes au lendemain de la victoire alliée pour mater cette première manifestation de masse, était au bout de sa course. On pensait que la botte française pèserait suffisamment lourd sur les musulmans : la paix serait assurée pour un bon moment.

 

Elle touchait à sa fin. L'heure sonna. La population, exaspérée par les injustices de l'administration coloniale, avait maintenant des têtes. À défaut de faire entendre une voix, ils feraient parler la poudre."

 

809477657.jpg

Éric MICHEL

 

Algérie ! Algérie !

 

Presses de la Renaissance,

 

Paris, France, 2007

 

Commentaires

Je vous remercie pour ce site, et pour tous ces efforts pour regrouper tant d'auteurs sur la Kabylie.
Moi-même j'ai créé un blog qui parle du village d'Ait Ali Ouharzoune

http://aitali-ouharzoune-retour-aux-sources.vip-blog.com/

Bonne continuation

Écrit par : Ait kaki hamid | 18/06/2009

Algérie ! Algérie ! est paru en Algérie en août 2011 aux éditions Talantikit

Résumé du livre :
Nedjma, le personnage principal féminin, traverse la guerre d’Algérie du 1er novembre 1954 jusqu’aux massacres policiers du 17 octobre 1961.
Une des particularités du roman tient à ce qu’il est écrit du point de vue algérien. Une autre à ce qu’il est étayé sur des sources historiques nombreuses et variées, référencées à la fin de l’ouvrage.
Le roman se divise en six parties :
1. « Ceux qui vont mourir te saluent », 1er novembre 54 - mai 56. La question de la torture et de la raison d’État tiennent une place prépondérante, dans un contexte où le gouvernement français abandonne en Algérie les pouvoirs de police à l’armée. Maurice Papon prend ses fonctions d’inspecteur général à Constantine. Louise, croyant son mari Amar assassiné par les paras, fuit la Kabylie pour la France avec sa fille de vingt ans, Nedjma.
2. « Les sentinelles », mai 56 - janvier 57. Nedjma s’engage aux côtés de Léo avec les porteurs de valise du réseau Jeanson, des activistes travaillant à ne pas couper les liens entre la France et l’Algérie. Sa mère, qui entretient une correspondance avec Fernand, leur passeur et contact à Alger, suit l’évolution de la guerre en Algérie et s’enfonce dans la dépression. Le frère d’Amar, Tahar, a choisi le camp des harkis. Il participe au premier attentat terroriste à Alger, organisé en sous-main par les ultras français.
3. « Cap au pire », janvier 57 - mai 59. Tahar, qui avait trahi son frère Amar et s’est illustré durant la bataille d’Alger aux côtés des paras, devient supplétif dans les forces de police française de Lyon. Les méthodes répressives testées en Algérie et la torture se diffusent en France, Maurice Papon est nommé préfet de police à Paris. De Gaulle arrive au pouvoir. Nedjma et Léo prennent de plus en plus de risques pour acheminer jusqu’en Suisse les fonds collectés par le FLN. Louise, elle, apprend que son mari Amar n’est peut-être pas mort, ce qu’elle cache à Nedjma.
4. « Comme on se venge pour conjurer la folie », juin 59 - septembre 60. En Algérie, des centaines de milliers d’Algériens sont parqués dans des camps, l’armée de libération nationale est mise à genoux par les forces françaises. En France, les Français Musulmans d’Algérie connaissent des heures noires. Le réseau des porteurs de valise est démantelé. Nedjma et Léo vivent dans une clandestinité désormais totale. Ils apprennent que Maurice Papon est lié au sort malheureux de leur père respectif. Amar, qui a eu connaissance de la situation des siens par Fernand, demande à ce dernier de tenir Louise dans l’espoir, sans encore lui révéler qu’il a pu s’échapper du centre de torture de Constantine où son frère l’avait envoyé. Passé en France, il poursuit le combat aux côtés du FLN.
5. « Noyés par balle », avril 61 - 13 octobre 61. Les harkis, recrutés en nombre au sein de la police française, terrorisent la population et torturent à tour de bras les Algériens dans les caves de leur Q.G. rue de la Goutte-d’Or. Parmi eux, Tahar a pris du galon. Bien qu’Amar le retrouve, il renonce à la vengeance pour ne pas briser le processus de paix amorcé entre le gouvernement français et le GPRA. Parallèlement, le 5 octobre, un couvre-feu raciste est décrété par Maurice Papon. Nedjma et Léo décident de l’assassiner.
6. « In nomine patrie », 13 octobre 61 - 1er novembre 61. Le FLN impose aux Algériens une manifestation pacifique le 17 octobre 61 pour resserrer ses rangs et rallier l’opinion publique française à l’indépendance de l’Algérie. Amar n’a plus de raison de taire son existence et rejoint trop tard sa femme, emportée par la maladie. Il découvre sur elle une lettre mentionnant le plan de leur fille. Tandis qu’hommes, femmes, enfants, quittent les banlieues, hôtels et bidonvilles pour le grand rassemblement, Amar, part dans les rues de Paris à la poursuite de Nedjma et de Léo. Il ignore, comme les 30 000 Algériens convergeant vers la capitale, que Maurice Papon a déjà mobilisé d’impressionnantes forces de police, et planifié une répression sans précédent.

Écrit par : Eric Michel | 16/09/2011

Les commentaires sont fermés.