26/02/2008
Lhadj Arezki Ouhouach (Mohand Ouremdane LARAB)
Rencontre entre Lhadj Arezki Ouhouach et Si Mohand Ou M’hand
C'est au café dit Lqahwa n Yeghzer, sis à l'entrée est de l'antique Bida Municipium, qu'eut lieu, en 1895, (il est bien précisé, 10 ans avant la mort de Si Mohand Ou M'hand), la rencontre entre le natif d'Icharaïouen et Lhadj Arezki Ouhouach. …
On raconte, ainsi qu'arrivé devant le seuil de ce lieu de détente et de consommation, Si Mohand aurait lancé, tout de go :
"Qui de vous pourrait me dire quel est cet oiseau dépourvu d'ailes ?"
Aussitôt après, une voix lui aurait répondu du fond de la salle :
"C'est le coeur !".
Satisfait, le citoyen du âarch At Yraten aurait répliqué, illico presto, à son interlocuteur :
"Aucun doute ! C'est toi Arezki Ouhouach et c'est après toi que je cherchais ! C'est même spécialement pour te rencontrer que je suis venu ! "
À peine eurent-ils échangé les accolades de rigueur que l'hôte ajouta à l'adresse de son confrère:
Ô hadj avec qui je suis lié d'amitié,
L'être intelligent.
Toi et moi, nous nous connaissons depuis longue date.
Nombreux sont les océans que tu as découverts
Pour avoir suivi la voix juste
Et échappé à celle du démon
En t'étant rendu à la Mecque sans égal
Éclatante tel croissant lunaire
D'où tu en es revenu hadj encore adolescent.
Et l'autre, de lui rétorquer, immédiatement après, ceci :
Je te prie, ô noble, de m'écouter
Je vais te dire ce que je pense
Ne fréquente point celui auquel tu es supérieur
Tu t'avilirais.
Prends garde de confier tes secrets
Tu serais trompé et trahi
Car, dans ce siècle, tous les gens sont faux.
Le poète Lhadj Arezki Ouhouach ne voudra pas qu'on parle de lui. Par là, il n'aimerait guère que son nom soit cité sur des pages de journaux ou de livres: question de nnif en ces temps-là. Il ne voulait donc, en aucune manière, faillir à la règle établie et porter ainsi atteinte à la communauté dont il est membre.
En conséquence, une délégation d'intellectuels, conduite par Saïd Boulifa, le sollicitant un jour, par le biais du caïd, se verra refusée catégoriquement.
L'administrateur, embarrassé, sera alors contraint de faire intervenir un parent éloigné de Lhadj Arezki pour qu'il tente de faire changer d 'avis le poète.
Après moult négociations serrées, à la suite desquelles le missionnaire de bons offices consultera les membres de la délégation et obtiendra leur aval, il ira vite retrouver Lhadj Arezki pour lui promettre l’anonymat. Et ce ne sera qu’une fois ce pacte conclu que le poète acceptera enfin que ses œuvres soient transcrites et colportées.
Extrait de la Préface de Mouloud HAOUCHE
Mohand Ouremdane LARAB
Lhadj Arezki Ouhouach
Éditions LE SAVOIR
Tizi-Ouzou 2007
08:35 | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook
19/02/2008
D'Algérie (MORVANDIAU)
Morvandiau, auteur de D’Algérie
Editions : L’oeil électrique 2 rue d’Andorre 35200 Rennes
08:13 | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook
14/02/2008
Mots de gazelles, pour lever le voile des tabous (MYRIAMA)
Certains hommes ne veulent pas que leur femme se fasse trop belle pour sortir. Et pour rentrer ?
J'ai expliqué à ma tante que si l'habit ne fait pas le moine, la jupe courte ne fait pas la prostituée et la moustache ne fait pas l'homme.
Chez nous, les filles veulent se marier à tout prix, les mecs pour rien au monde, heureusement qu'il reste les mariages mixtes !
À force d'entendre ma mère me répéter que les filles ne sortent pas le soir, j'ai bien cru que j'allais devenir un garçon !
Un jour j'ai dit à mon père "il faut que je te parle de quelque chose" ; il m'a dit "ça y est, tu veux te marier ?". Ca a été ma première et dernière tentative de parler politique avec lui !
Assister à l'accouchement n'est pas une obligation pour l'homme : dans la mesure où il a assisté à la conception, c'est le principal !
Quand un garçon naît, son père sacrifie un mouton ; pour la fille c'est quand il est sûr qu'elle va quitter la maison pour se marier qu'il achète un mouton !
On peut aller chez un marabout parce qu'on a mal à la tête, mais pas chez un psy pour le mauvais oeil !
Etre bien dans sa peau, c'est ne pas avoir besoin de ressembler à quelqu'un d'autre pour plaire.
J'en ai marre de me faire appeler la gazelle à chaque fois que je vais en vacances au bled. Je suis une tigresse autant capable de me défendre qu'un lion alors que les gazelles se font croquer toutes crues !
Chez nous les tabous sont un moyen de faire taire les femmes qui ont tant de choses à dire tout en donnant l'occasion aux hommes de dire quelque chose de profond : "tais-toi !".
Mots de gazelles, pour lever le voile des tabous
Auteur : Myriama
Dessins : Samiha Driss
Éditeur : Horay, Paris, France
Les Ailes de l'Islam bleu, CrisEcrits, 2005.
10:54 | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook
07/02/2008
Mouloud Feraoun et l'éthique du journalisme (Mehenni AKBAL)
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À ce stade de notre propos, un regard furtif dans le rétroviseur s'impose. D’abord il y eut l'enfance. Une enfance misérable, cruelle, rapetassée. Une misère quasiment générale. Ce fut, malgré tout et après tout une enfance regrettable. Regrettable car faite d'innocence, d'insouciance et de naïveté. À cinq ou six ans, il faut exécuter les injonctions maternelles, s'arrêter, devant le petit cimetière de la maison des Soeurs blanches, sur la route carrossable entre Taguemount-Azouz et Tizi-Hibel, pour regarder la tombe de Mouloud Feraoun. Une tombe qui m’avait toujours impressionné. Une tombe qui a poussé dans un décor traditionnel et ancien. Tout laisse à penser qu’avant Feraoun il y eut des morts. Et après lui, il n'y en a eu aucun.
6ème à dix ans, bac à 17 du temps où on le présentait à 19. Jamais je ne me suis vu par contre, décerné un quelconque prix. Tantôt intéressé. Tantôt désintéressé. Engouement pour certains enseignants, désenchantement pour d'autres. Ennui devant certaines situations, amusement devant d'autres. Un élève moyen avec une scolarité superbement banale et sans histoires.
Cependant, j’avais à cette époque déjà fait mon choix. Entre un Hugo, un Baudelaire, un Musset, un Vallès, un Maupassant, un Bataille, un Tolstoï, un Gibran, un Al-Hakim, un Al Aqqad, un Choukri, un Al Ma'arri et une révision pour un examen, d'une échéance décisive, je nourrissais une grande prédilection pour un des cités au masculin négligeant, sans regret et sans remords, celle citée au féminin.
Durant mon enfance, j'avais beaucoup lu. Je vivais dans les livres et dans les bandes dessinées. Je l'avais fait car j’avais de l'otium, j'en avais. Jamais, je n'avais imaginé un seul instant, à cette époque, que l'acte de lire pouvait me servir un jour. Cela ne me procurait aucun bonheur. Aucun malheur. Ne provoquait en moi aucune sérénité. Ne suscitait aucune angoisse. Je le faisais uniquement pour m'occuper. J'étais comme ces oisifs qui lisent (et) que Nietzsche haïssait.
Certains auteurs m'avaient beaucoup séduit. Hergé m'avait emmené et conduit ailleurs. Il m'avait fait découvrir un autre monde. Un monde différent du mien. Un monde que je méconnaissais. Il m'avait fait rêver. J'avais accompagné Tintin dans tous ses voyages. Lui et moi, nous partîmes au Tibet, au pays des Soviets, au Congo, en Amérique, au pays de l'or noir. Nous découvrîmes L 'étoile mystérieuse, Le trésor de Rackham le Rouge. Ensemble, nous avions marché sur la lune. Nous avions percé Le secret de la licorne. Nous prîmes le vol 714 pour Sydney,
Cependant, si Hergé m'avait coupé et isolé des miens, Mouloud Feraoun m'avait fait découvrir ma condition et ma réalité. Il m'avait réduit à ma stricte nudité. La lecture de son Le Fils du pauvre m'avait permis de m'identifier, de me reconnaître, de me connaître.
Adulte, j'ai continué à aimer les livres et leurs silencieuses conférences. Souvent, je m'emploie à arranger ma bibliothèque. Une bibliothèque assez riche. Une bibliothèque que j'ai toujours enveloppée et continue d'envelopper d'un amour actif et constant. L'amour et le respect que je dois aux livres, m'ont été inculqués, depuis mon innocente et tendre enfance, par feu l'instit. Ma bibliothèque a bien changé d'aspects de nombreuses fois. Je ne sais d'ailleurs plus ce que sont devenus les livres et les bandes dessinées de mon enfance. Ceux que mes instits, mon frère et ma mère m'ont offerts. Je n'ai même plus souvenir de ce que sont devenus ceux de mon adolescence. J'aurais aimé voir figurer sur un de ses rayons L 'Ami fidèle, mon premier livre de lecture, dont les textes d'une grande valeur littéraire et d'une grande beauté artistique m'avaient fait rêver durant mon enfance. Je savais à cette époque déjà que la série L 'Ami fidèle, qui devait m'accompagner du CE1 au CM2, avait été conçue par un des miens : Mouloud Feraoun.
…
Mehenni AKBAL
Mouloud Feraoun et l'éthique du journalisme
Introduction (extrait)
Editions El-Amel
2007
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