17/01/2011
Les Noirs en Kabylie (Mouloud GAÏD)
Les noirs en Kabylie furent introduits par les Turcs en les admettant comme auxiliaires auprès de leurs garnisons de janissaires en Kabylie.
Le Caïd turc de la Basse Kabylie, Ali Khodja, pour parer aux attaques incessantes de Si Ahmed Ben Ali Ben Khettouch [24], fit renforcer le Bordj de Tazarart et y installa une colonie de nègres (1720) appelés Abib-ou-Chemlal ramenés du Sud.
Le Caïd Mohamed Ben AIi connu sous le nom de Mohamed Debbah fit venir 400 noirs du Sud qu’il établit à Tala N’Zouia (Boghni) en 1746. Dotés de chevaux et d’armes, ils participèrent aux collectes d’impôts et aux opérations militaires. [25] Le Dey Ibrahim Pacha autorisa ses Caïds à attribuer des terres domaniales à ces nouvelles recrues. Ceux-ci s’y établirent avec leurs familles créant ainsi des mouls Abid. Dans le Sébaou, on les installa au sein de la tribu des Ait Amraoua, entre le confluent de l’Oued Aïssi, et l’oued Amraoua, au pied du Djebel Baloua. Cette colonie se divisa bientôt en trois fractions : Tazmalt n’Bou Khoudmi, Tazmalt n’Kaâ-ou-Meraï, Tazmalt n’Taba Othman.
Dans la région d’Akbou, la colonie noire fut installée près du passage de Chabet-EI-Ahmeur. Les colonies noires prospérèrent tant que les Turcs y demeurèrent puissants. Certains de leurs chefs épousèrent des femmes kabyles d’origine très modeste recherchant protection et sécurité pour elles-mêmes et pour leurs proches souvent étrangers à la tribu locale. À la longue ; il se constitua une catégorie de population fort métissée qui s’intégra progressivement à la population autochtone.
La chute des Turcs obligea la grande majorité d’entre eux à chercher refuge et protection ailleurs. Ils émigrèrent ou se dispersèrent dans la région pour offrir leurs services aux puissantes familles locales. Ceux de la grande Kabylie, furent admis chez Belkacem ou Kaci de Temda el Belat, Mohand ou el Hadj de Taguemount ou Aamrouche.
Ceux d’Akbou furent engagés par Ourabah qui les cantonna à Ighil Alouan dans les Ait Tamzalt ; par Mohand-Ou Châbane qui les établit à Tighilt-Amérian dans les Fenaïa ; par Mohand-Ou Chalal qui les installa à El Flaye dans les Béni-Oughlis ; par Ben Ali Chérif qui les mit au service de sa zaouia de Chellata. On leur donna des noms rappelant leurs origines : Ould Abid ; Aberkane ; Berkane ; Lekehal ; Akli.
[24] A partir de 1625-1626. la famille Bel Kadi (ancien roi de Koukou) est connu sous le nom de Oulad Bou Khettouch. Les descendants de Bou Khettouch existent encore à Tamda, à Djemâa Sahridj et à Souama, ils disposent d’un certain nombre de documents attestant cette ascendance. La fille de Amar Bel Kadi Ben Khettouch marié avec Si Chérif Boutouch des Aït Boutouch de la tribu des Aït Idhourar eut un fils qui devint plus tard Caïd du Sebaou et Bey du Tittri. Ses descendants s’étaient établis à Blida. Revue africaine T7, p. 293 p.8, p.365
[25] Le Caïd Mohamed Ben Ali fut appelé Mohamed Debbah (l’égorgeur) en raison de sa cruauté. Il fit égorger, dit-on, plus de 1200 kabyles, faits prisonniers au cours des campagnes dans la région.
Extrait de "HISTOIRE DE BEJAÏA ET DE SA RÉGION" depuis l’antiquité jusqu’à 1954
Éditions MIMOUNI 1976
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13/01/2011
Amitié kabyle (Moussa BOUREIMA)
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09/01/2011
Paris-Alger, classe enfer (Mustapha BENFODIL)
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Enfin Alger ! Pollution. Klaxons. Canicule. Ghachi19. Château-Neuf. Ministère des Moudjahidine. Nous avons rendez-vous avec Samir à 14 heures. Samir est le cousin de Makhlouf Cyberbère. C’est grâce aux bons offices de Samir que Makhlouf a eu son registre de commerce, euh.., je voulais dire sa carte de Fils de Pute de Martyr de la Révolution.
Makhlouf a dit c’est 1000 euros le rendez-vous, 5000 euros les faux témoins, 10 000 euros l’attestation communale une fois délivrée.
L’Attestation communale : le plus précieux document de la R.A.D.P20. Il atteste de la participation du concerné aux pages glorieuses de la Guerre d’Indépendance. Indispensable dans les campagnes électorales pour tous les candidats qui étaient en âge de faire chier la France en 1954.
- Asseyez-vous, mademoiselle. Un café ou un thé ?
- Juste un verre d’eau s’il vous plait. Je peux fumer ?
- Je vous en prie.
Samir lui donna l’eau et le feu. Sabrina fit déchaîner en lui tous les éléments. Samir est d’Ifri Ouzellaguène. Un village perché sur la vallée de la Soummam qui avait réuni les déclencheurs du Congrès de même nom sous la férule d’un certain Abane, chef politique étranglé dans un hangar désaffecté à Tétouan le 27 décembre 1957. Le frère de Samir avait été tué dans les « Evènements de Kabylie », comprendre ceux du « Printemps Noir » (18 avril 2001- 12 juin 2003).
Samir connaît le mot de passe pour pirater le fichier du Ministère, celui qui, sur une colonne, recensait les héros, et sur la colonne d’en face, consignait les noms des traîtres et des proscrits. D’un simple coup de manette magique, il fit basculer le nom de M’Hand Le harki de l’extrême à l’extrême. Ainsi, par le miracle de l’informatique, un collabo est absout vite fait de ses forfaits et passe comme une lettre à la poste dans la case des « icônes ».
Deux témoins du village partirent chez le procureur et jurèrent sur la tête de deux bières et une enveloppe de 2 000 euros que le harki en question avait été victime d’un complot ourdi à l’époque où le FLN n’arrivait plus à savoir qui étaient ses amis et qui étaient ses ennemis. « Oh, c’est vrai qu’il était Messaliste, et qu’il avait une carte du MNA21. Mais à l’époque, vous savez, c’était pas facile de choisir son camp. Très peu de gens croyaient à l’avenir de la Révolution. »
Comme aujourd’hui, très peu croient à l’avenir de ce pays, songea Da Mokrane.
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Au dernier moment, les avis divergèrent quant au rapatriement des vieux os du père de Sabrina. Un référendum fut organisé. Les vieux votèrent « pour ». Les jeunes votèrent « contre », en scandant, « ulac smah ulac 22».
De toute façon, ils votent toujours « contre », les rebelles.
Et Sabrina dut attendre que tous les jeunes du village vieillissent un peu pour rapatrier les os de son père.
De guerre lasse, je finis par adhérer au Cyberbère de Makhlouf. Le village avait retrouvé soudain son calme. Les plus incultes apprenaient l’anglais et connaissaient par coeur leurs droits civiques et même politiques. Ils prenaient part à des « forums » où ils pouvaient parler de tout. Les mômes vieillissaient vite. Les plus chanceux se mariaient chaque soir virtuellement, faisaient des enfants par correspondance, et obtenaient de vrais certificats d’hébergement.
Beaucoup furent rapatriés par Sabrina, afin de baisser le taux du « non » dans le référendum. Et M’Hand le Harki fut enfin enterré au village après que Sabrina eut fait passer en France une bonne ribambelle de fouteurs de merde, au désespoir de Sarkozy.
Et le ârch23 de Paris est né. Il entra même dans le dictionnaire « Larouche ». Même les vieux du village rêvent maintenant de foutre le camp. Ils n’ont plus le coeur à disserter sur le rôle des harkis dans la prolifération des crimes contre l’humanité et des débits de boisson après les accords d’Evian. Les plus irréductibles, on leur entendait des mots amers dans la bouche.
Des mots lourds.
« Regarde ce qu’ils ont fait de l’Algérie, les Fellagas ! »
« Chère Sabrina,
Aujourd’hui, à thajemaïth, ils ont traité ton père de fou d’avoir fait un tel souhait pour un dernier voeu. Et comme c’est tous des fous au village, chacun à sa façon, ils ont dit que ton père était des leurs comme si de rien n’était. Et toi aussi bien sûr, le jour où tu voudras mourir – non pas pour ce pays – mais dans ce pays…
Da Mokrane te dit : « De grâce, garde-moi une place au Père-Lachaise ! »
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19 Ghâchi : populace.
20 République Algérienne Démagogique et Populiste.
21 Mouvement National Algérien, fondé par Messali Hadj en 1955 pour contrer le FLN.
22 Littéralement « Pas de pardon ! ». Slogan-phare des émeutes kabyles, scandé dans la gueule du pouvoir depuis l’assassinat par un gendarme, du jeune Guermah Massinissa le 18 avril 2001.
23 Ici, allusion aux ârchs ou « Laârouche », structure d’inspiration traditionnelle comptant des délégués de tous les villages, et qui est à la tête du mouvement insurrectionnel kabyle.
Mustapha BENFODIL
Paris-Alger, classe enfer
(nouvelle)
Les Belles Etrangères, 2003
Éditions Barzach
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