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23/05/2013

L’Action politique en Algérie (Docteur Mahmoud BOUDARÈNE) 3

Le peuple algérien ne semble pas, pour l'instant, séduit par les expériences de nos voisins …

 

En réalité, la montée de la contestation politique est confrontée à la même logique de dispersion. La pléthore de sigles - association, commission, front... -, inconnus jusque là, qui appellent au changement du régime ne rassurent, sans doute, pas le citoyen. Vers qui se tourner ? A qui faire confiance ? Et les appels au changement de quelques personnalités politiques nationales ont ajouté à la confusion. Une cacophonie qui paralyse, à n'en pas douter, la synergie des volontés. Toutefois, l'absence de réaction de la rue algérienne - un sursis accordé au régime - ne doit pas réjouir et être interprétée comme une victoire à mettre à l'actif des décisions « alimentaires » prises récemment par le gouvernement ou à la levée de l'état d'urgence ou encore aux promesses de procéder à réformes politiques.

Personne n'est dupe. Les expériences de nos voisins et le mécontentement de plus en plus grand qui se manifeste à l'intérieur de nos frontières devraient à contrario interpeller le pouvoir et constituer une opportunité à mettre à profit pour arrêter d'ignorer les aspirations du peuple. Ce dernier, le pouvoir, devrait voir là une occasion à saisir pour aller vers la construction d'un pacte social, avec tous les acteurs politiques et tous les partenaires sociaux. Une opportunité inespérée à mettre à profit pour travailler à réduire la crise de confiance qui ruine les relations entre le peuple et les pouvoirs publics ; dans tous les cas, des conditions favorables qu'il ne faut pas rater pour prendre rendez vous avec l'histoire, car le vent du changement qui souffle actuellement sur la rive sud dela Méditerranéene peut pas ne pas, un jour prochain, concerner l'Algérie.

 

Vingt cinq millions d'algériens ont moins de trente ans. Un chiffre que je ne cesserai pas de rappeler, une donnée démographique superbement ignorée par le pouvoir mais qui devrait pourtant empêcher les décideurs de dormir. Car, si cette population ne construit pas l'avenir de notre pays -parce qu'elle est marginalisée-, elle peut, à contrario, en être la « bombe sociale » qui va le compromettre. Des jeunes qui ont de grands besoins de consommation, sans doute, mais qui sont également l'avenir et la vitalité de la nation. Des jeunes qui ont besoin de contribuer à l'effort d'édification de la nation. Des citoyens qui ne peuvent pas prétendre, aujourd'hui, à une vie décente et digne.

L'Algérie n'a jamais connu autant de contestations sociales simultanées. La révolte est dans les quartiers, dans les villages et les hameaux les plus reculés du pays. Les chômeurs ne sont pas seuls à  menacer ; les universitaires -étudiants et enseignants- sont également mécontents ; le monde de l'éducation et les praticiens de la santé publique -médecins et paramédicaux- ne sont pas en reste ; les gardes communaux, les chercheurs en physique nucléaire, les enseignants contractuels, les pompiers, les travailleurs dela Présidence... En guise de réponses aux vrais problèmes qui hypothèquent dangereusement, l'avenir du pays, le pouvoir fait dans la manoeuvre et propose de fausses solutions. Il met en place, une fois de plus, une stratégie faite de fausses promesses et de colmatage par une politique d'assistance au citoyen. Comme à l'accoutumée, des sommes faramineuses vont être dépensées pour acheter momentanément la paix. Gagner du temps, c'est le but recherché et c'est le souci véritable des décideurs. Ils savent, aujourd'hui, qu'une course contre la montre est engagée et que l'issue, est improbable.

Les autocraties et les monarchies totalitaires arabes sont entrain de tomber une à une et la menace sur l'unité et la souveraineté de certains de ces pays prend actuellement l'aspect d'une fatalité. Pendant ce temps, le pouvoir algérien, fidèle à sa logique, donne la pathétique image d'un pompier qui tente de prévenir un incendie qu'il sait pourtant inévitable et qu'il ne fait que différer, si l'avilissante réalité quotidienne des jeunes Algériens demeure.

« Sans liberté vraie et sans honneur, je ne puis vivre ». Albert Camus écrivait cela pour dénoncer les conditions de vie indignes imposées aux Algériens par l'Empire colonial français. Est-ce que ces conditions ont changé depuis que l'insurrection de novembre1954 a chassé le colonialisme de notre pays ? Rien n'est moins sûr. 50 ans après l'indépendance, l'Algérie est assurément un pays riche mais une nation qui n'est pas prospère. 36 millions d'habitants, une population jeune, exclue de la décision, humiliée par une misère quotidienne et rongée par le désespoir. Il y a trop de pauvreté dans notre pays et les inégalités sociales sont criantes ; il y a trop d'injustice, de hogra et de corruption ; le citoyen souffre du manque de liberté et a soif de démocratie. Une situation qui ne peut pas et ne doit pas durer.

L'histoire est également en marche pour l'Algérie, une lumière, un espoir mais elle peut être porteuse de périls. Le régime politique actuel doit en prendre acte. Ce dernier s'est largement discrédité par une gouvernance marquée par l'injustice et la brutalité. Parce que le temps fait son oeuvre, les caciques du pouvoir sont biologiquement condamnés à disparaître. Mais avant que cela n'arrive, les uns et les autres peuvent encore rendre service à la nation et entrer dans l'histoire par la grande porte. Ils savent ce qui leur reste à faire.

Liberté, 18 mars 2011

 

 

Mahmoud Boudarene_ph-LeMidiDZ.gifDocteur Mahmoud BOUDARÈNE

 

L’Action politique en Algérie

 

Un bilan, une expérience et le regard du Psychiatre.

 

 

Éditions L’Odyssée

 

Tizi-Ouzou 2012

 

 

 

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